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L’internet dérange. Le média ment. Lutte pour la liberté du net !

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Sa vidéo a été regardée par plus de 12 millions de personnes. Sabrina l’interne en médecine interpellait la ministre Marisol Touraine sur la situation des hôpitaux dans la période d’épidémie de grippe. Son propos a été déflagrateur comme toute parole de vérité quand un pesant couvercle de mensonges et de propagande bloque la vapeur dans la marmite sociale. Inutile ici de reprendre la description qu’elle a faite de la situation. Désormais tout le monde la connait. Et sinon chacun peut encore regarder sa vidéo qui vaut mieux que mille textes sur le sujet. Ce qui m’a frappé, c’est la suite.

La police politique médiatique s’est aussitôt mobilisée en son quartier général de France Inter sur la matinale « oui-oui-oui-il-n’y-a-qu’une-politique-possible ». Après avoir donné la parole à l’interne suivant la politique du guet-apens qui fait le charme de ce moment de radio, Patrick Cohen s’est senti obligé le lendemain de se déclarer surpris et abusé par l’interne car elle ne serait pas ce qu’elle dit et ne serait ni aux urgences ni à l’hôpital public. Deux mensonges grossiers proférés par le bon prêcheur en reprise de ceux diffusés par Martin Hirsch, le grand manitou de l’Hôpital public parisien. Mensonge repris sans aucune vérification par le journaliste-éthique-indépendant-et-même-un-peu-impertinent pour qui toute déclaration officielle est vraie et toute parole de protestataire est suspecte et doit être relativisée. Le même homme ayant donné la parole à un auditeur qui se félicitait de la gifle donnée à Valls avait beaucoup à se faire pardonner. Il a donc choisi de colporter une calomnie pour faire plaisir au pouvoir qui la proférait. Vieille technique : pour tuer le message tuer le messager.

L’interne qui dérange a donc connu ce qui fait notre quotidien avec cette affreuse engeance : passer plus de temps à se défendre des saletés qu’ils répandent sur nous qu’à porter notre propre message. Entre ses gardes à l’hôpital et ses autres obligations familiales, voilà l’interne Sabrina condamnée à faire des vidéos de défense, montrer sa feuille de paie, faire une rencontre avec d’autres urgentistes et ainsi de suite. Bien joué le journaliste, non ? Il a bien pourri la vie de l’interne, bien détourné l’attention, bien enfumé. Du vrai travail de pro de l’info. Évidemment tous ses collègues qui sont pourtant pendus aux rideaux dès qu’on fait une critique sur l’un des membres de la sainte corporation, restent muets devant un tel déni des règles de base de leur métier. Ici c’est une nouvelle tentative de censure qui a échoué.

Heureusement que l’interne Sabrina avait le moyen de se défendre contre l’émission officielle de la radio officielle et contre la calomnie officielle, grâce au réseau libre de YouTube. Une fois de plus on voit pourquoi et comment nos propres réseaux d’information sont un contre-pouvoir face à la parole officielle médiatique. Et on voit bien pourquoi à notre tour nous devons défendre ce contre-pouvoir. Le défendre notamment contre les moyens de censure que peuvent être tentés de mettre en œuvre les propriétaires des tuyaux par lesquels passe notre parole. Je pense ici à l’automaticité de l’interruption d’une chaîne quand des malveillants s’arrangent pour essayer de présenter plusieurs dénonciations en même temps comme ce fut le cas récemment contre ma chaîne YouTube. Pour la faire, les intéressés s’appuyaient sur leurs droits d’auteurs alors qu’il s’agissait pourtant de ma propre interview ! On imagine ce que ce serait si en plus il s’agissait de l’interview de quelqu’un d’autre…

À ce propos, un youtubeur m’a interrogé sur ce que je pensais de cette question de la censure possible sous le régime de la défense du droit d’auteur, et même à obtenir des sanctions contre lui, comme ce fut mon cas. Je me permets de renvoyer à la lecture du livret thématique de « la France Insoumise » consacré au numérique. On y verra que la lutte contre la censure privée est bien présente dans notre réflexion. D’une façon générale je crois que tous les aspects qui menacent la liberté du net doivent être soigneusement étudiés et contrés. Dans le contexte actuel, le flou juridique qui entoure le droit de citation audiovisuelle rend possible tous les abus de pouvoir.

C’est dans ce cadre que YouTube lui-même peut exercer une censure contre les vidéastes. Le plus triste est que parfois c’est uniquement grâce au ContentID. Combien de fois déjà n’a-t-on pas vu la triste bobine du smiley qui annonce l’impossibilité d’accéder à un contenu à cause de lui ! Comment cet automate pourrait-il être en mesure d’apprécier le cadre légal s’appliquant à une vidéo ? Vous vous souvenez que le gouvernement Valls qui s’était opposé à l’extension du droit de citation lors des débats sur le projet de loi sur la République numérique ! Pour ma part, j’y suis favorable. Je sais bien qu’il est nécessaire de trouver un juste équilibre entre le respect du droit d’auteur et la liberté de création et d’expression sur internet. Mais comme c’est déjà le cas pour les œuvres écrites, ne peut-on en tirer des enseignements ? S’il est possible de vendre des essais politiques contenant des citations dont on précise la source cela doit l’être également pour des vidéos publiées en ligne.

Je trouve très dangereux pour notre liberté le projet européen de limiter le droit de faire des liens ou d’utiliser des extraits de matériel d’autres producteurs. Le lien hypertexte est l’essence du partage sur internet et sans doute sa plus haute valeur ajoutée en tant que sollicitation intellectuelle. Pour rester dans la défense et illustration du droit au « youtubage » intégral, je vous propose ici une vidéo explicative de Ludo et de « Osons causer » sur le sujet.

Le fond de l’affaire est dans l’idée qu’on se fait du travail des vidéastes. Pour ma part je considère qu’ils contribuent à la création et à la diversité culturelle de notre pays. Ils doivent donc être reconnus comme des auteurs à part entière. Pour cela, il faut aussi dire qu’une mise à jour des aides existantes en matière culturelle est nécessaire pour redonner la priorité à la diversité et à la solidarité. Sinon comment prendre en compte les nouvelles formes de production médiatiques et culturelles ? Je crois qu’on peut proposer une réflexion sur le statut des vidéastes. Il faut trouver les conditions de leur indépendance financière vis-à-vis de la plateforme. Je crois qu’il faut se proposer la reprise collective du contrôle de l’hébergement et de la diffusion des contenus. Nous avons engagé ce travail. Je souhaite qu’il soit très concrètement avancé lors de l’atelier législatif que la France Insoumise va consacrer à ce sujet. Je pense recevoir bientôt une invitation à rencontrer des youtubeurs pour discuter de ces questions. On en fera peut-être même une diffusion sur YouTube.

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