Un article du groupe thématique Numérique de La France insoumise
Adoptée en première lecture ce mardi 24 novembre 2020 à l’Assemblée nationale, la proposition de loi (PPL) sécurité globale déposée par le groupe LREM constitue une atteinte critique aux droits fondamentaux. Dénoncé par le Haut Commissaire aux droits de l’Homme de l’ONU comme portant atteinte au droit à l’information et au contrôle démocratique des institutions publiques, dénoncé par le Syndicat national des journaliste (SNJ), contraire à la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et à l’intégrité de l’État de droit, le texte est engagé en procédure accélérée par le Gouvernement.
La PPL Sécurité globale est un texte alimentant une surenchère technologique toujours plus sécuritaire au détriment des libertés individuelles et collectives :
- La mise en place de dispositif de renvoi en temps réel à un centre opérationnel des flux vidéo piétons des forces de l’ordre (Art. 21) permet de renforcer la progression des technologies de reconnaissance faciale dans l’espace public. Tous les visages captés, sans le consentement des individus, pourront être croisés avec le fichier des Traitements des Antécédents Judiciaires (TAJ), qui, comme le rappelle la CNIL, contient les « photographies des individus comportant des caractéristiques techniques permettant de recourir à un dispositif de reconnaissance faciale », ouvrant ainsi la porte à des identifications massives automatisées et non plus à l’œil humain. Des identifications dont les marges d’erreurs sont majeures selon les cas.
- Le renforcement des prérogatives de la police municipale (Art. 20) et la mise en place de vidéosurveillance dans les halls d’immeubles (Art. 20 bis) constitue en ce sens une interpénétration dangereuse de la vie privée dans la sphère de surveillance contrôlée par les forces de l’ordre et le pouvoir politique alors même que la vidéosurveillance n’a jamais fait la preuve de son utilité en faveur de la sécurité publique.
- L’autorisation des forces de l’ordre à procéder à la captation, l’enregistrement et la transmission d’images par drones (cf. « caméras aéroportées », Art. 22), au-delà du périmètre d’un bâtiment à sécuriser, favorise une gestion de l’ordre par flux déshumanisée et nous éloigne toujours un peu plus d’une approche humaine visant à protéger les individus.
- L’interdiction de diffusion d’images des forces de sécurité (Art.24) a pour objectif de consolider les pouvoirs répressifs et de surveillance des forces de sécurité, il nuira davantage à la liberté d’expression et d’information, alors même que les forces de l’ordre essaient déjà d’interdire toute captation de leur image dans un contexte légal qui aujourd’hui leur est moins favorable. Les images des forces de l’ordre captées par les victimes de violences policières et leur entourage constituent pourtant souvent les seules preuves de leurs excès.
La PPL Sécurité globale est une première étape dangereuse vers la transposition du Livre blanc de la sécurité intérieure révélé le 16 novembre dernier par le Ministère de l’Intérieur : un arsenal législatif liberticide complet visant à renforcer les prérogatives répressives des forces de l’ordre publiques et privées à l’ère de la surenchère technologique. L’objectif est clair : décourager les populations d’informer, de manifester, droits pourtant garantis dans les articles 10 et 11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.
Face à la menace, le groupe thématique Numérique de La France insoumise s’associe aux 159 organisations associatives, citoyennes et politiques résolument engagées contre la loi sécurité globale.
Luttons, battons-nous. Le numérique ne peut être un instrument servile d’un capitalisme de surveillance effréné. Un autre numérique est possible, celui des communs numériques, éthique et inclusif, au service de l’intérêt général pour toutes et tous.