Édito de Matthias Tavel publié le 12 juin 2019 dans l’Heure du Peuple.
La collecte des signatures pour réclamer un référendum contre la privatisation des Aéroports de Paris commence cette semaine. Il en faudra 4,7 millions, soit un électeur sur dix, à rassembler d’ici mars 2020. C’est ce que prévoit la procédure du référendum d’initiative partagée (RIP), enclenchée par plus de 200 parlementaires de tous bords dont LFI en avril.
Les signatures appuient la proposition de loi qui reconnait ADP comme un « service public
national ». Or, le préambule de la Constitution de 1946, intégré à la Constitution actuelle, dispose que « toute entreprise dont l’exploitation a ou acquiert les caractères d’un service public national doit devenir la propriété de la collectivité ». L’adoption de la proposition de loi rendrait donc inconstitutionnelle la privatisation d’ADP que les macronistes viennent de voter et que le pouvoir a dû suspendre.
L’essentiel reste à faire. Une fois collectées, 4 717 396 signatures obligeraient à l’examen de la proposition de loi et il faudrait un coup tordu de l’Assemblée et du Sénat réunis pour empêcher qu’elle soit soumise à référendum en vue de son adoption.
On peut signer en ligne sur le site www.referendum.interieur.gouv.fr, ou dans des points d’accès par canton qui doivent être mis en place. Mais cela ne se fera pas tout seul. C’est une tâche militante de première importance : en famille, auprès de ses collègues, dans son syndicat, son association, son quartier. L’enjeu en vaut la peine.
La démarche engagée est une victoire des Gilets jaunes. Sans eux, jamais des parlementaires de droite acquis au principe des privatisations n’auraient participé à un tel appel. Bien sûr, le RIP est bien plus restrictif que le référendum d’initiative citoyenne. Mais l’appétit démocratique vient en mangeant : la réussite de cette première campagne serait un signal puissant !
La lutte elle-même est d’intérêt général. C’est une lutte pour la démocratie : refuser que Macron et ses amis ne prennent une telle décision sans en avoir jamais parlé dans la campagne électorale. C’est une lutte pour le contrôle public des entreprises et secteurs stratégiques. C’est une lutte antioligarchique contre le pillage de la privatisation des profits et de la socialisation des pertes à l’instar des autoroutes. C’est une bataille sociale et écologique, tant la transition écologique et les salariés concernés ne peuvent être abandonnés au taux de rentabilité d’un gestionnaire privé. C’est une bataille européenne : la privatisation des aéroports français est l’écho à la privatisation des aéroports grecs par Tsipras à la demande de l’UE. C’est évidemment aussi une lutte pour clore la période Macron puisqu’il était déjà ministre PS quand il a privatisé les aéroports de Nice, Lyon et Toulouse.
Voici donc une campagne citoyenne, qui s’adresse à tous sans cloisonnement partisan, pour la souveraineté populaire et l’exigence démocratique. Voilà une boussole. Elle mènera au-delà d’ADP.