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ABSTENTION – Une « insurrection froide contre toutes les institutions du pays »

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Intervention de Jean-Luc Mélenchon le 28 juin 2020 au soir du second tour des élections municipales. Retrouvez ci-dessous la retranscription de son intervention. Seul le prononcé fait foi.

Nous n’avons pas encore tous les résultats, bien sûr, mais assez pour pouvoir constater quelques tendances fondamentales.

La première d’entre elles, celle qui domine toute la situation dans laquelle nous vivons, c’est évidemment le niveau de l’abstention. C’est l’abstention, le refus d’aller voter le plus important dans une élection municipale depuis 1958. C’est le niveau d’abstention le plus élevé que toutes les élections législatives depuis 1958. C’est le niveau d’abstention le plus élevé comparé à toutes les élections européennes depuis 1979. Clairement, la masse du peuple français est en grève civique. C’est une forme d’insurrection froide contre toutes les institutions du pays au moment où l’État voit son autorité s’effondrer dans les comportements de la police et être mise en cause par ceux de la Justice. C’est donc un moment compliqué, dangereux, de la vie de la Nation qui se présente devant nous.

Pour le reste, on observe évidemment un échec massif du parti du président de la République, la République en Marche. Et si on met de côté l’arbre qui cache la forêt au Havre, on voit que partout ailleurs, quelqu’aient été les conditions dans lesquelles la République en Marche est disposée pour le deuxième tour, la défaite est venue à la clé.

De notre côté, les insoumis, présents pour la première fois dans une élection municipale, nous étions dans le deuxième tour dans 200 villes du pays. Et c’est un résultat que nous trouvons appréciable, même si nous l’avons géré d’une manière modeste et sans fanfaronnade. C’est pourquoi maintenant nous pouvons nous dire contents de nous voir dans des coalitions qui ont gagné ou vont sans doute gagner ce soir. C’est le cas à Toulouse, mais c’est le cas à Lyon. C’est le cas à Marseille, où je forme le vœux que ma suppléante, Madame Sophie Camard, qui avait été la mieux positionnée à la fin du premier tour avec 40 % des voix, gagne la mairie du 1er secteur. Plusieurs villes, déjà, ont une municipalité installée dans laquelle les insoumises et les insoumis sont présents. C’est le cas à Bourges, à Périgueux et d’autres encore, à Tours, à Grenoble évidemment puisque depuis le premier jour les insoumis et les écologistes font équipe commune.

Au demeurant, on doit constater dans le pays que les listes d’Europe Écologie-Les Verts ou dirigées par Europe Écologie-Les Verts, car souvent c’est une coalition, marquent des succès remarquables. Et j’observe que c’est souvent le cas dans les villes dont les maires étaient socialistes et étaient passés à La République En Marche. De ce point de vue, les succès sont ici une forme d’assainissement politique contre ceux qui changent d’étiquette et de rôle en cours de rout

Mais quoiqu’il en soit, il est très difficile de tirer des enseignements d’une situation dans laquelle tant de gens s’abstiennent, où il y a un tel néant civique qui se dresse en face des listes. Alors, évidemment, il faut féliciter ceux qui ont maintenant les responsabilités locales, mais il ne faut pas perdre de vue que c’est sans l’assentiment du très grand nombre de notre peuple. Et ça, sans doute, c’est le plus grand défi qui est devant nous. Car au moment où va déferler un mascaret de désastres sociaux, nous avons besoin de pouvoir nous rassembler pour faire face. Pour trouver des solutions concrètes qui évitent que la misère ne vienne détruire tant et tant de nos familles dans ce pays. Les élections municipales peut-être y pourvoiront. Mais elles auront surtout pourvu à l’aggravation de la crise civique dans ce pays.

C’est donc l’heure du renouveau politique qui doit sonner. C’est l’heure du grand changement. Grand changement des institutions, grand changement des politiques sociales, grand changement des politiques écologiques. Et, naturellement, ce n’est pas avec ceux qui sont en place que ces changements peuvent avoir lieu. C’est du peuple qu’ils doivent venir. Et j’ai l’espérance que nous y parvenions bientôt.

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