Édito de Benoît Schneckenburger publié le 17 juin 2019 dans l’Heure du Peuple.
Le nouvel épisode de la saga Godzilla traduit une réponse possible du système à la crise écologique actuelle : une multinationale échappant à tout pouvoir politique tente de gérer les conséquences des abus de la prédation humaine, mais finalement les forces profondes de la nature sauront relever les défis de notre temps. Godzilla, la nature profonde, résoudra la crise aidé heureusement en cela par l’énergie nucléaire. Fermez le ban.
Et pourtant nous le savons bien l’enjeu écologique est d’une tout autre hauteur. Godzilla semble mettre en cause la responsabilité humaine, ce que traduit l’expression anthropocène mais nous savons qu’il s’agit surtout du capitalocène, le cercle infernal de la prédation et de la pollution décollant avec l’industrialisme anglais, le capital détruisant la nature et les hommes, ce que soulignent les lectures marxistes de l’écologie. C’est au XIX° siècle que se met en place le grand déménagement du monde, avec ses conséquences politiques, la colonisation permettant au capitalisme de se servir largement sans considération des hommes.
En même temps la majorité d’Emmanuel Macron en reste à l’écologie de marché, c’est-à-dire au seul marché : la loi mobilité qui ne s’attaque pas à l‘ubérisation des transports, elle refuse de taxer le kérosène des avions. Les promesses n’engageant que ceux qui les écoutent, au lendemain des européennes la ligne de fret par Rail qui alimente Rungis sera finalement fermée. Il en est de même pour les mesures sociales : avec la réforme annoncée des retraites, le gouvernement franchit un pas de plus en faveur d’une mesure libérale, quand la mise en place de la Loi Blanquer sur l’école de la confiance masque de moins en moins une logique comptable de réduction des moyens, et la fin de l’école républicaine.
Pourtant une des leçons principales des élections européennes concerne aussi la difficulté de concilier les aspirations sociales et l’urgence écologique. Le système a choisi d’orchestrer le duo Le Pen/Macron, manière de ne pas répondre à l’enjeu de rupture avec le capitalisme. Ni l’extrême droite ni l’extrême marché ne répondront aux enjeux écologiques et sociaux. Il reste à convaincre que l’alternative existe, l’écologie populaire. Car, c’est sûr, Godzilla ne sauvera personne.