Introduction aux vœux de Jean-Luc Mélenchon à Marseille

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Retrouvez l’intervention de Prune Helfter-Noah et Bernard Borgialli, candidat·e·s aux élections européennes en introduction des voeux de Jean-Luc Mélenchon, le 18 janvier 2019 (à revoir ici).

Prune Helfter-Noah
Bernard Borgialli

Après deux mois d’une révolution citoyenne qui ne faiblit pas, Le Président Macron s’interroge dans une lettre écrite aux Français·es de ce qu’il faudrait faire et défaire à l’occasion d’un grand balbla national qui devrait prendre fin, espère t-il avec la mobilisation, le 15 mars !
Cette lettre jupitérienne est si loin de nous, que nous avons décidé de vous livrer « LA LETTRE », celle qui aurait dû être la synthèse d’une clameur populaire pour quiconque écoute et entend, et non cherche la diversion et l’enfumage !

« Chères Françaises, chers Français, mes chers compatriotes, cher·e·s résident·e·s étranger·e·s

Le mouvement Gilets Jaunes est une révolution citoyenne. Comme tous les mouvements de ce type, son issue politique est incertaine. Il est donc de notre devoir de l’accompagner au mieux pour en faire advenir ses potentialités les plus audacieuses, ses éventualités les plus émancipatrices, ses propositions les plus enthousiasmantes.

J’ai entendu les revendications qui s’expriment depuis deux mois à travers tout le pays, dans les rues, sur les ronds-points et sur les réseaux sociaux. Vous vous interrogez légitimement sur l’inaction du gouvernement face à l’urgence climatique. Vous remettez en question l’accaparement des richesses par une minorité de nos concitoyen·ne·s. Vous doutez de la capacité des institutions de la Ve République à traduire l’intérêt général. Afin que nous décidions ensemble des modalités de dépassement du capitalisme, afin que nous choisissions ensemble les règles qui régiront la constituante, il est nécessaire et légitime que nous nous reposions ensemble les grandes questions de notre avenir.

C’est pourquoi j’ai proposé et je lance aujourd’hui un grand débat national qui se déroulera jusqu’au 15 mars prochain. À ce débat, je souhaite que le plus grand nombre d’entre nous, Français·e ou non, puisse participer. Je fais ici référence aux 4 millions d’étranger·e·s qui vivent dans notre pays et qu’il convient, bien sûr, de faire participer au débat démocratique.

Nous avons retenu 7 grands thèmes qui reprennent les 7 chapitres du programme L’Avenir en commun sur lequel nous avons été élus : l’urgence démocratique, l’urgence sociale, l’urgence écologique, l’Europe en question, la paix en question, le progrès humain d’abord, la France aux frontières de l’humanité.

Le premier sujet porte sur notre système institutionnel à bout de souffle. Nous vivons dans une monarchie présidentielle qui confine à l’irresponsabilité permanente. Élu pour cinq ans, le Président de la République n’est responsable devant personne, n’a de comptes à rendre à personne pendant son mandat. Ce régime est celui de la dépossession du peuple de sa part de souveraineté politique. En République, il n’y a pas d’autre souverain que le peuple. Pourtant, dans les faits, c’est tout le contraire qui se produit. L’exemple le plus connu et le plus scandaleux est celui du référendum bafoué du 29 mai 2005, lorsque la France a rejeté le traité constitutionnel européen ; à peine trois ans plus tard, le traité de Lisbonne, copie conforme du traité rejeté, était ratifié en catimini. Conséquence de tout cela, le peuple est en situation d’insurrection.

Pour sortir de la crise civique et démocratique, il faut avant tout appeler l’ensemble des citoyennes et des citoyens à s’impliquer personnellement dans la réécriture collective du pacte qui fonde notre peuple et notre république. Et pour faire cette refondation républicaine, il faut convoquer une assemblée constituante dont le seul mandat sera l’élaboration d’une nouvelle constitution.
Quelle serait la bonne méthode pour désigner les membres de l’assemblée constituante ?
Quel délai faudrait-il donner à l’assemblée constituante pour rédiger le texte soumis ensuite à référendum ?
Comment garantir le respect des droits fondamentaux au sein de la 6e République et éviter à l’avenir toute forme de dérive autoritaire ?

Le deuxième sujet sur lequel nous devons prendre des décisions, c’est l’urgence sociale. La France est l’un des pays d’Europe qui compte le plus de millionnaires (plus de deux millions de personnes). Conséquences : la pauvreté gagne du terrain, le chômage se généralise, l’État se disloque, les services publics reculent. Comment sortir de cette spirale ? L’appauvrissement des classes moyennes et les misères du peuple n’ont rien de fatal. Notre pays n’a jamais été aussi riche. Il est donc temps de se donner les moyens de partager la charge de travail nécessaire. Protégeons de la finance les salarié·e·s et la production en France. Révolutionnons les impôts pour que tout le monde paye, et que chacun le fasse selon ses moyens réels.

Quelles entreprises publiques privatisées ou en voie de privatisation faut-il, en priorité, renationaliser ?
Quel type de mesures de rétorsion commerciale prendre à l’encontre des paradis fiscaux ?
Comment moduler l’impôt sur les sociétés pour encourager les entreprises à faire un usage socialement utile de leurs bénéfices ?
Selon quel calendrier devons-nous résorber l’emploi précaire dans le secteur privé et dans la fonction publique ?

La planification écologique est le troisième thème, essentiel à notre avenir. Le changement climatique a commencé et s’accélère. Il menace de détruire le seul écosystème compatible avec la vie humaine. Comment empêcher la catastrophe ?
La transition énergétique est vitale ! Il s’agit de répondre ici et maintenant à l’intérêt général humain face au dérèglement climatique. Ce grand changement doit modifier tous les compartiments de la vie de notre société par une planification écologique.
Nous savons bien que tout cela nécessite des investissements massifs, une abondante main-d’œuvre qualifiée et bien payée. Mais l’exigence écologique ne peut être réduite à des proclamations et des mesures qui épargnent le système. La finance n’en veut pas : elle préfère les grands rendements de la spéculation. La définanciarisation de l’économie est une condition incontournable de la transition écologique, ainsi que l’a noté avec beaucoup de sagesse notre ancien Ministre, Nicolas Hulot.
Quelle proportion du budget de l’Etat consacrer au développement des énergies renouvelables et à la sortie du nucléaire ?
A quelle échéance fixer l’obligation de servir 100% de produits alimentaires bio dans la restauration collective ?
A quel rythme développer le maillage de transports en commun et de services publics sur tout le territoire, dans les départements ruraux et les quartiers populaires ?

Le quatrième sujet concerne l’Europe, sujet d’actualité car nous sommes appelés aux urnes le 26 mai prochain pour élire nos représentant·e·s au Parlement européen. Je vous rappelle d’ailleurs, pour ceux qui ne seraient pas inscrits sur les listes électorales, que vous pouvez désormais le faire jusqu’au 6e vendredi précédant le scrutin, soit fin mars pour cette élection.
L’Europe de nos rêves est morte. L’Union actuelle est seulement un marché unique et les peuples sont soumis à la dictature des banques et de la finance. Comment stopper ce cauchemar ? Nous devons sortir des traités européens qui nous font obligation de mener des politiques d’austérité, d’abolir l’action de l’État et les investissements publics. Tout cela au prétexte d’une dette dont tout le monde sait qu’elle ne peut être payée dans aucun pays. Notre indépendance d’action et la souveraineté de nos décisions ne doivent donc plus être abandonnées aux obsessions idéologiques de la Commission européenne.

Quel mandat donner à la Banque centrale européenne pour qu’elle serve l’emploi et la transition écologique ?
Comment réorienter la PAC dans un sens favorable à l’agriculture paysanne et à la protection des sols ?
Que proposez-vous pour augmenter les pouvoirs des parlements nationaux et renforcer le parlement européen ?

C’est autour de la paix que tourne le cinquième sujet, alors que l’armée française est engagée dans un nombre sans précédent de conflits armés.

Avec quels partenaires prendre l’initiative de créer un tribunal international de justice économique, un fonds d’urgence solidaire, une banque solidaire d’investissement, en lieux et places du FMI et de la Banque mondiale ?
Devons-nous fournir directement les moyens civils de sauvetage en mer Méditerranée pour éviter des milliers de noyé·e·s, ou appuyer massivement les ONG qui effectuent cette mission essentielle ?
Comment en finir, enfin, avec l’ingérence française en Afrique et les traités commerciaux inégaux ?

Le progrès humain, sixième thème, est aux antipodes de la grotesque course à l’accumulation que certain·e·s nous présentent comme un horizon indépassable. Nous refusons un monde qui opposerait celles et ceux qui ont réussi et celles et ceux qui ne sont rien.

Que faire des assureurs privés devenus inutiles une fois que nous serons passés au remboursement à 100% par la sécurité sociale des soins de santé prescrits avec tiers payant intégral ?
Combien de places en crèche ouvrir dans les cinq ans ?
Dans quelle proportion augmenter le personnel travaillant dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes ?

Enfin, le septième thème concerne la mer, l’espace, le monde du numérique et du virtuel qui sont les nouvelles frontières de l’humanité. Les Français·es excellent dans ces domaines d’avenir. Mais l’ambition politique est absente !

Comment porter la France aux avant-postes de l’humanité pour contribuer à l’essor universel ?
Quels partenariats imaginer pour lancer un programme international de dépollution des océans et de récupération des déchets flottants ?
Comment généraliser l’usage des systèmes d’exploitation et des logiciels libres dans les administrations publiques et l’éducation nationale ?

Ce débat est une initiative inédite dont j’ai la ferme volonté de tirer toutes les conclusions. Ce n’est ni une élection, ni un référendum. C’est votre expression personnelle, correspondant à votre histoire, à vos opinions, à vos priorités, qui est ici requise, sans distinction d’âge ni de condition sociale. C’est ainsi que j’entends transformer avec vous les colères en solutions.

Françaises, Français, résident·e·s étranger·e·s, je souhaite que le plus grand nombre d’entre vous puisse participer à ce grand débat afin de faire œuvre utile pour l’avenir de notre pays.

En confiance »

Bonne année à toutes à tous !

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