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« La présidentielle, ce n’est pas le PMU » – Interview dans Sud Ouest

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Interview de Jean-Luc Mélenchon publiée dans Sud Ouest le 26 août 2016

Sud Ouest. Nicolas Sarkozy a décidé d’axer sa campagne sur l’identité française : droit du sol sous condition, suspension du regroupement familial, interdiction du voile à l’université… Que lui répondez-vous ?

Jean-Luc Mélenchon. Nous n’avons pas la même vision des priorités ni de la cohésion nationale. Son programme s’appelle « Tout pour la France », en vérité, c’est tout pour la finance. Il utilise « l’identité » comme un bélier pour abattre la résistance morale des gens. Son but est de diviser le peuple pour gagner la guerre sociale qu’il veut mener. Car son programme compile les mesures désastreuses pour les acquis sociaux : retraite à 64 ans, suppression la durée hebdomadaire légale du travail… C’est un retour au 18 ème siècle.

Cette offensive identitaire serait donc un leurre ? 

C’est un écran de fumée. Comme, il ne peut se présenter devant les Français avec pour seul programme la régression sociale aux ordres de la Commission européenne, Nicolas Sarkozy l’agrémente de la haine pour tous.

C’est l’une des conséquences des attentats de cet été : la sécurité est devenue la préoccupation numéro un des Français. Que leur dîtes-vous sur ce point ? 

C’est d’abord le résultat d’un harcèlement inouï. Les responsables publics, et le système médiatique ont perdu tout sang-froid. L’origine des attentats terroristes est dans la guerre qui se mène au Moyen Orient. Là, il n’est pas question de religion mais d’oléoducs et de gazoducs. Mais dorénavant aussi  tous les fous du monde peuvent commettre des crimes en se réclamant de l’islam même s’ils ne le pratiquent pas. Les services de sécurité font tout ce qu’ils peuvent. Mais la question des moyens humains à déployer reste posée. Je préfère des agents infiltrés présents sur le terrain à l’espionnage électronique généralisé par lequel on a cru pouvoir régler ce problème. Et bien sûr il faut arrêter la guerre.

Concernant la polémique sur le burkini, que pensez-vous des maires ayant décidé de les interdire ? 

Le jour de l’entrée en dette écologique de la planète avance au 8 août mais on discute des tenues de bain ! On détourne l’attention de l’essentiel : l’argent roi. C’est lui qui pourrit nos vies, la planète et la paix. Là, la France bas des records : ce pays distribue le plus de dividendes en Europe. Il n’y a pas d’argent pour les payes et les services publics mais les actionnaires se gavent.

À gauche aussi, la campagne de 2017 est lancée. Arnaud Montebourg est désormais candidat. Vous êtes sur le même espace ?

Non. Il est candidat à la primaire du PS. Moi je serai candidat devant le pays jusqu’au bout. Sa sévère condamnation du bilan de François Hollande me sert. Elle est d’autant plus convaincante qu’il était aux premières loges. Ajouté à Benoît Hamon et Cecile Duflot, on voit ainsi pour la première fois trois anciens ministres essayer d’empêcher le président qui les a nommés d’être réélu tant il est nul.

Malgré la primaire socialiste, la gauche va se présenter en ordre dispersée…

Non. A la fin, je serai là. François Hollande ne propose pas une candidature de gauche puisqu’il a continué tout le programme de Nicolas Sarkozy. Son ennemi devait être la finance et il a commencé par lui faire cadeau de 40 milliards d’euros.

Ces allègements de charge étaient pourtant destinés aux entreprises…

Si quelqu’un est capable de retrouver la trace de ces 40 milliards dans l’activité réelle, qu’il se signale. Qu’est ce qui est de gauche dans le bilan de François Hollande ? Il a fait pire que Nicolas Sarkozy. Mais le plus navrant, c’est que de Hollande à Sarkozy en passant par Juppé, Valls et Macron, tous ont comme projet de continuer à appliquer de manière encore beaucoup plus violentes des recettes qui ont tout détruits ces 20 dernières années. Ce sont les candidats de la Commission européenne.

Une embellie semble se dessiner sur le front du chômage. Cela peut-il conforter la politique de François Hollande ?

Non. La situation de l’emploi ne s’améliore pas. Nous n’observons que de petites fluctuations autour du point zéro. Ca montre que l’organisme n’est pas mort. Mais tant qu’on ne conduira pas une politique de relance, l’emploi ne repartira pas. Cette relance doit être écologiste. Je propose un choc de 100 milliards d’euros à injecter dans la planification écologique. Et c’est parfaitement finançable.

Dans le contexte de menace terroriste que l’on connaît, le risque d’un 21 avril ne vous inquiète-t-il pas ?

On se guérira le pays par la démocratie. La présidentielle, ce n’est pas le PMU. Si on en reste à faire des paris sur le résultat sans se préoccuper des enjeux, il n’y a plus de démocratie. Le FN c’est le diable de service. Il est utilisé pour faire peur et rameuter. Mais pour quoi faire ? Continuer comme avant ? Mais c’est insupportable. Il n’y a pas une dispersion de la gauche, mais une opposition de programme. Pour certains, le problème c’est le peuple, pour moi c’est la solution.

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