Qu’est ce que la loi « sécurité globale » que veut faire passer le gouvernement ?
La proposition de loi « sécurité globale » sera examinée à l’Assemblée nationale à partir du 17 novembre. Cette loi est une fausse initiative parlementaire de député·es LREM, le gouvernement a en réalité co-écrit ce texte pour y insérer les mesures qu’il souhaitait. Il veut donner des moyens de contrôle accrus à la police et la gendarmerie. Cette proposition de loi prévoit notamment la surveillance par drones ou encore l’interdiction de diffuser des images du visage ou de tout autre élément d’identification d’agents de la police ou gendarmerie nationale.
De nombreux rassemblements sont prévus le 17 novembre pour protester contre cette proposition qui porte atteinte à la liberté de manifester et qui est aussi une attaque très grave contre la liberté de la presse et le contrôle des violences policières. 106 organisations dont le Syndicat des Avocats de France, le Syndicat National des Journalistes, ATTAC ou encore la Ligue des droits de l’Homme ont signé un texte commun pour alerter des dangers de cette loi concernant la liberté de manifester.
Sécurité globale :
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Avec cette loi, la police pourra-t-elle utiliser des drones et la reconnaissance faciale ?
L’article 22 de la proposition de loi prévoit de légaliser la surveillance par drones dans une multitude de situations, notamment pour la surveillance des manifestations. Un usage qui n’a pour l’instant pas de base légale. Pourtant, afin de surveiller le confinement et les manifestations, le Préfet de police de Paris, Didier Lallement, a déjà utilisé des drones à plusieurs reprises dans la capitale.
L’article 21 prévoit que les images des caméras-piétons puissent être transmises en temps réel au poste de commandement, même pour la police municipale.Les centres de commandement pourraient renseigner en direct les agents de terrain sur l’identité des personnes si celles-ci sont déjà enregistrées, à tort ou à raison, dans un ficher appelé le TAJ (Traitement d’antécédents judiciaires). Cela fait peser le risque d’abus à l’encontre de ces personnes (confiscation de matériel, fouilles, gardes-à-vue préventives), notamment lors des manifestations. Tout comme pour les caméras mobiles, les images captées par drones pourraient être analysées par reconnaissance faciale en temps réel.
À l’inverse d’une doctrine de désescalade pour le maintien de l’ordre qui serait la bienvenue, le gouvernement se concentre sur ce qu’on appelle l’approche confrontationnelle. Ces deux articles participent de cette approche et encourageront donc la surveillance généralisée de nos rues.
Pourquoi la liberté d’informer est-elle menacée par cette proposition ?
L’article 24 vise à dissuader de filmer et photographier les policier·es. Il n’était pas prévu dans la version initiale du texte. C’est un ajout sur commande de Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur. Cette proposition est à la base faite par Alliance police, corporation policière radicalisée, qui ne supporte pas que les journalistes et les manifestant·es puissent filmer et diffuser les violences policières de plus en plus nombreuses, notamment sous le quinquennat d’Emmanuel Macron.
C’est une atteinte importante à la liberté de la presse et à la liberté d’informer. En effet, de nombreuses affaires de violences policières ont pu être révélées grâce à la diffusion de vidéos de ces interpellations. Pouvoir filmer l’action de la police et de la gendarmerie est une garantie démocratique nécessaire rattachée à un impératif de contrôler celles et ceux qui exercent la contrainte. Elle est un contre-pouvoir non-violent qu’il est impératif de conserver. Les policier·es et gendarmes n’ont pas besoins d’une protection supplémentaire puisque plusieurs articles du Code pénal existent déjà pour les protéger en cas d’atteinte à leur vie privée.
La Défenseure des droits a souligné l’importance du caractère public de l’action des forces de sécurité qui permet son contrôle démocratique, notamment par la presse et les autorités en charge de veiller au respect de la loi et de la déontologie.
Est-ce que la loi « sécurité globale » va à l’encontre de notre liberté de manifester ?
Les articles sur le nouvel usage des caméras et de drones constitueraient des atteintes graves à la liberté fondamentale de manifester. En effet, la Défenseure des droits juge que cette surveillance « ne présente pas les garanties suffisantes pour préserver la vie privée ». De son côté, le conseil des droits de l’homme de l’ONU s’inquiète également du contenu de cette loi : « Nous exprimons de sérieuses préoccupations selon lesquelles l’usage de drones avec caméras, en tant que méthode particulièrement intrusive, est susceptible d’avoir un effet dissuasif sur des individus qui se trouvent dans l’espace public et qui souhaiteraient participer à des réunions pacifiques, et par conséquent limiter indûment leur droit à la liberté d’expression et à la liberté de réunion pacifique. »
La loi sécurité globale confirme la logique confrontationnelle du gouvernement. Après les mesures de la loi « anti-casseurs » d’avril 2019 qui permettent déjà des arrestations préventives lors de manifestations, des contrôles, des fouilles et des atteintes manifestes à la vie privée ce serait un pas supplémentaire pour dissuader les gens de manifester et pour cibler les militants politiques, associatifs ou syndicaux. Cela n’encourage pas une pacification des relations entre la population et la police.
Comment m’y opposer ?
Les député·es insoumis·es voteront contre cette loi à l’Assemblée nationale, mais la majorité LREM et ses alliés voteront pour. Elle risque donc de passer très prochainement malgré les multiples dangers qu’elle présente. Elle vient s’ajouter à la longue liste de mesures qui démontrent une dérive autoritaire d’Emmanuel Macron.
Pour vous opposer à cette loi liberticide, rejoignez l’un des nombreux rassemblements qui sont organisés le mardi 17 novembre. L’un d’eux se tiendra à Paris devant l’Assemblée nationale à partir de 18h. Partagez aussi cette page autour de vous pour informer la population de ses dangers. Enfin la Quadrature du net vous propose d’appeler votre député au sujet du vote de cette loi.