Question écrite de la députée Clémentine Autain à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères sur le génocide rwandais.
Il y a 23 ans, entre les mois d’avril et de juillet 1994, plus de 800 000 personnes ont trouvé la mort dans le génocide des Tutsis et des opposants Hutus au Rwanda. 23 ans après ce drame terrible, les circonstances exactes de ces meurtres de masse ne sont toujours pas connues. Une part d’ombre persiste sur ce qui fut le génocide le plus rapide de l’histoire, qui a exterminé près de 75 % de la population Tutsi.
La France était présente à l’époque au Rwanda, via l’opération Turquoise, une opération militaire organisée par la France, autorisée par la résolution 929 du Conseil de sécurité de l’ONU et qui avait pour objectif d’assurer la sécurité et la protection des personnes en danger au Rwanda. Toutefois, le rôle joué par la France est régulièrement remis en question. La France a notamment fait l’objet d’attaques frontales du président du Rwanda. Ces dernières années, Paul Kagamé a critiqué publiquement à de nombreuses reprises la France pour l’aide qu’elle aurait accordée aux génocidaires.
Ainsi, le 25 mars 2004, le président rwandais s’en était pris à la France pour son rôle « avant, pendant et après le génocide ». Il avait aussi reproché à l’armée française, détachée sur place lors de l’opération Turquoise, d’avoir aidé les génocidaires et de n’avoir pas protégé les victimes. De même, lors des cérémonies de commémoration en 2014, le président rwandais a réitéré ses propos. Dans un entretien au quotidien Libération, il avait aussi affirmé que « la France comme la Belgique ont joué un rôle néfaste dans l’histoire de son pays et ont contribué à l’émergence d’une idéologie génocidaire ».
Enfin, il y a quelques jours, le journaliste Patrick de Saint-Exupéry, dans un article de la Revue XXI, a fait part de découvertes accablantes sur le rôle présumé de la France dans ce massacre. La France, au mépris de l’embargo sur les armes voté par l’ONU, aurait donné l’ordre de réarmer les forces génocidaires en déroute.
Cette décision aurait été prise malgré le refus de certains militaires, qui ont auraient fait valoir leur droit de retrait pour ne pas obéir à des ordres qu’ils ne comprenaient pas. La France ne peut pas laisser ces accusations d’une extrême gravité sans réponse. Le 7 juin 2016, le président de la République François Hollande avait opéré une déclassification partielle des archives de l’Élysée concernant les actions menées au Rwanda, premier pas nécessaire. Il est désormais temps pour la démocratie française de faire la lumière sur les responsabilités dans le génocide rwandais.