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Non, Gérard Depardieu ne rend pas fière la France

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Un article du GT Égalité Femmes-Hommes 

La France insoumise appelle aux rassemblements qui se tiendront partout en France le 11 janvier. A Paris le rendez-vous est à 18h, place Saint-Augustin.

En 2017, les révélations sur le producteur de cinéma Harvey Weinstein et l’émergence du mouvement #MeToo ont permis d’encourager et libérer la parole des femmes et de révéler l’ampleur des violences sexistes et sexuelles. La diffusion, ce 7 décembre par France 2, d’une enquête sur Gérard Depardieu où il harcèle sexuellement ses accompagnantes et sexualise une enfant de 10 ans a profondément choqué. Interrogé sur le sujet et érigeant Depardieu en victime d’une “chasse à l’homme”, euphémisant ses agressions en parlant d’un montage tronqué sans jamais penser aux véritables victimes, Emmanuel Macron a choisi de minimiser, banaliser et ainsi perpétuer la culture du viol. 

Mettre fin aux violences sexistes et sexuelles dans les arts et la culture

Ces dernières années, de vastes mouvements de libération de la parole ont traversé les arts et la culture. En octobre 2021, #MeTooThéâtre révélait ce que le mouvement #MeToo dans son ensemble a largement démontré : le caractère systémique des violences sexistes et sexuelles. « Tout le monde savait » et pourtant, les femmes sont contraintes à la loi du silence alors que les agresseurs, et davantage les plus célèbres et puissants, restent protégés et glorifiés. Si les violences sexistes et sexuelles sont diverses et touchent toute la société, l’affaire Gérard Depardieu illustre le fonctionnement du système d’oppression patriarcale, se nourrissant des multiples rapports de domination, notamment économique et sociale, et de pouvoir. Les inégalités entre hommes et femmes dans la culture en termes de représentation, de reconnaissance, de célébrité, de rémunération, de moyens et de programmation nourrissent un sexisme structurel propice aux violences, aux dominations et à la silenciation des victimes. Femmes, minorités de genre et personnes racisées en subissent de plein fouet les conséquences, brisant ainsi leurs carrières et leurs vies. L’omerta et l’impunité règnent alors que les agresseurs profitent de la précarité des travailleur·ses des arts et de la culture pour les violenter sur leur lieu de travail. 

Après la tribune publiée en défense de l’acteur, différentes contre-tribunes ont recueilli les signatures de personnalités du monde de la culture [1], associatifs et associatives [2], pour s’opposer à ce système patriarcal. Nous saluons leur initiative, refusant que le statut d’artiste ou le talent ne justifient un traitement singulier et ne servent de totem d’impunité. Car protéger l’art signifie également protéger les artistes : « Les monstres sacrés n’existent pas. Il n’y a que des hommes ordinaires auxquels ont a donné tous les droits » [3]. 

Où est passée la grande cause du quinquennat ? 

Depuis 2017, le gouvernement se complaît dans des effets d’annonce et de communication, érigeant la lutte contre les violences faites aux femmes en grande cause du quinquennat. Le bilan de cette grande cause est pourtant tout autre. La Fondation des Femmes évoque ainsi le « paradoxe de #MeToo » : alors que nous n’avons jamais autant parlé de violences faites aux femmes, leur prise en charge est moins satisfaisante qu’avant [4]. Et pour cause, alors qu’Emmanuel Macron est interrogé sur l’affaire Depardieu, il répond que « Gérard Depardieu rend fière la France », dénonçant une prétendue « chasse à l’homme ». Si la présomption d’innocence est un principe important, on parle ici d’images et de propos accessibles, dont le contenu est incontesté. Le président balaie la parole des victimes, les treize témoignages recueillis par Mediapart [5], les propos et comportements abjects de Depardieu révélés par Complément d’Enquête, et le témoignage de l’actrice Emmanuelle Debever, alors qu’une enquête est toujours ouverte pour savoir si son suicide le 6 décembre dernier a un lien avec la diffusion de ce reportage. Il omet également de mentionner que Gérard Depardieu est inculpé depuis 2020 pour viols et agressions sexuelles et que trois plaintes ont été déposées entre 2019 et décembre 2023, par les comédiennes Charlotte Arnould et Hélène Darras, ainsi que la journaliste et écrivaine Ruth Baza. Des oublis consciencieux et une invisibilisation des victimes sinistres qui sont tout sauf anodins et ne cachent en réalité que le mépris du président pour les droits des femmes. Dans une société où faire valoir ses droits en justice quand on est victime de telles violences est si difficile, le président de la République aurait dû leur dire : « je vous crois ». 

Actuellement, seules 1% des plaintes pour viol aboutissent à une condamnation. Le manque de formation des fonctionnaires de police empêche les victimes d’accéder à la justice et d’être psychologiquement soutenues, encourageant la double peine. Les répercussions psychologiques, physiques et sociales sur les victimes sont aggravées par l’omerta et la défiance de la société. La défaillance de notre système judiciaire est telle qu’elle nourrit l’impunité tout en représentant un coût important pour les victimes. Elles ont ainsi tout à perdre à porter plainte, surtout quand l’accusé est connu et puissant. Dans ce contexte, l’association #MeTooMedia [6] explique que les paroles du président dénient à toutes les femmes victimes de violences le droit à être entendues et crues. La faute politique d’Emmanuel Macron est grande et participe à légitimer un système qui encourage le viol. 

Les femmes payent les conséquences de l’inaction et de la complaisance du gouvernement avec les agresseurs 

Les réponses apportées par le quinquennat Macron, qui prétendait faire de la lutte pour les droits des femmes la grande cause du quinquennat, ont été des paroles sans actes. Pire encore, sa politique a abouti à un recul des droits des femmes et des enfants victimes de violences : maintien de deux ministres accusés d’agression au gouvernement, baisse drastique du budget par femme victime de violences, manque de places en hébergement d’urgence, éviction du juge Edouard Durand à la tête de la CIIVISE et rétrécissement de sa mission, refus d’inclure le viol dans la directive européenne de lutte contre les violences faites aux femmes, etc. 

Une politique non seulement irresponsable, mais également dangereuse et mortifère, à l’heure où l’extrême droite s’attaque aux droits des femmes partout en Europe et dans le monde. Ce n’est par ailleurs pas un hasard si la première tribune signée en défense de Depardieu a été rédigée par un sous-chroniqueur proche d’Eric Zemmour, habitué des plateaux télévisés d’extrême droite. Si certain·es signataires s’en sont désolidarisé·es pour cette raison, cette tribune démontre une nouvelle fois les liens existant entre l’extrême droite et l’idéologie masculiniste. Nous devons impérativement la combattre partout, pour lutter contre la domination masculine, atteindre l’égalité effective et réelle dans tous les domaines et empêcher tout nouveau recul des droits des femmes. 

Nos propositions

Il est urgent de permettre aux victimes de faire valoir leurs droits dans les meilleures conditions. Pour cela, un plan clair est nécessaire : développer la prévention, la formation, aider les associations et remettre en route la justice. 

Nous proposons les mesures suivantes : 

  • Créer un Haut-commissariat dédié à la lutte contre les violences sexistes et sexuelles. Il impulsera les mesures à prendre, aura des liens réguliers et privilégiés avec les associations féministes et qui luttent contre les violences faites aux femmes
  • Appliquer pleinement et entièrement la loi de 2001 relative à l’éducation à la vie affective et sexuelle pour prévenir les violences de genre et sensibiliser les élèves au consentement et à la connaissance de leurs droits et de leurs corps, par des formations adaptées à l’âge, dès l’école élémentaire
  • Lutter activement contre les discriminations de genre qui persistent dans les arts et la culture, par la formation, la prévention et l’accompagnement, conditionner les aides du CNC au respect de la norme sociale et de la lutte contre les discriminations
  • Organiser des campagnes d’information et de sensibilisation permanentes dans les services publics, en particulier dans les transports en commun et dans les médias
  • Allouer le budget demandé par les associations de luttes contre les violences faites aux femmes 
  • Assurer une formation spécifique et obligatoire en matière de violences sexistes et sexuelles pour tou·tes les professionnel·les concerné·es (santé, police, justice, éducation nationale, services sociaux…)
  • En finir avec la correctionnalisation des viols, notamment par la formation et l’augmentation des moyens du personnel judiciaire et de police

Retrouvez nos autres mesures pour lutter contre le patriarcat et promouvoir une société féministe et émancipatrice ici : https://​melenchon2022​.fr/​l​i​v​r​e​t​s​-​t​h​e​m​a​t​i​q​u​e​s​/​e​g​a​l​i​t​e​-​f​e​m​m​e​s​-​h​o​m​m​es/ 

[1] Collectif,  “Depardieu : contre-tribune des artistes”, Cerveaux Non Disponibles, 29 décembre 2023 ; Collectif, “Affaire Depardieu : l’art n’est pas un totem d’impunité”, Libération, 1er janvier 2024

[2] Tribune collective initiée par MeTooMedia, “Affaire Depardieu : “Monsieur le président, vos paroles dénient à toutes les femmes victimes de violence le droit à être entendues”, Le Monde, 27 décembre 2023 

[3]Collectif, “Affaire Depardieu : l’art n’est pas un totem d’impunité”, Libération, 1er janvier 2024 

[4] Fondation des Femmes, Où est l’argent contre les violences faites aux femmes ?, 25 septembre 2023

[5] Marine Turchi, “Violences sexuelles : 13 femmes accusent Gérard Depardieu”, Mediapart, 11 avril 2023[6] Tribune collective initiée par MeTooMedia, “Affaire Depardieu : “Monsieur le président, vos paroles dénient à toutes les femmes victimes de violence le droit à être entendues”, Le Monde, 27 décembre 2023

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