Communiqué de presse des députés LFI, membres de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire
Le mercredi 18 janvier, la délégation de la commission du développement durable de l’Assemblée nationale qui s’était rendue à la COP15 de Montréal a livré son bilan de ce déplacement. Dans le cadre de cette restitution, les député.es LFI-NUPES de la commission du développement durable, dont la députée Manon MEUNIER, présente à la COP15, interpellaient le ministre de la transition écologique.
Dans le cadre des négociations, le gouvernement français est accusé d’avoir poussé pour un accord au rabais, selon des associations et ONG présentes sur place. Il aurait notamment empêché l’intégration de critères qualitatifs et contraignants dans l’objectif de protection de 30% de la surface de la Terre et d’avoir refusé la création du fonds mondial pour la biodiversité.
A ce jour, le Ministre n’a toujours pas répondu. Manon MEUNIER et les député.es LFI-NUPES renouvellent donc leur interpellation, et demandent à M. Béchu des explications sur les accusations qui lui sont portées, pour que lumière soit faite sur le rôle de la France au cours de ces négociations.
Un accord au rabais
Dans la nuit du 18 au 19 Décembre, les 190 états membres de la COP15 ont adopté l’accord de « Kunming-Montréal ». Si cet accord a été largement salué par la presse comme étant historique et ambitieux, des grosses lacunes perdurent, et son application laisse place au doute.
Si l’objectif de protection de 30% de la surface de la Terre d’ici à 2030 est louable, les critères d’application restent trop flous. Dans les aires marines protégées par exemple, les activités industrielles ne sont pas interdites, mais simplement limitées, et les techniques de pêche intensive sont permises. Avec la deuxième zone économique exclusive au Monde, la France avait une responsabilité majeure dans le durcissement de ces critères, en bannissant toute activité industrielle des aires protégées. Pourtant, d’après certaines ONG, les représentants d’Emmanuel Macron auraient au contraire tout fait pour éviter que cet objectif de 30% inclue des critères qualitatifs et contraignants.
Par ailleurs, si les garanties données aux peuples autochtones sont une avancée, avec la restauration de 30% des terres dégradées, elles ne sont pas suffisantes. Les peuples autochtones représentent aujourd’hui seulement 6% de la population mondiale, mais gèrent au moins 25% de la surface de la terre, qui concentre plus de 80% de la biodiversité. Aussi, les moyens mis en œuvre pour restaurer cette biodiversité doivent être bien plus importants. Les pays du Sud demandaient une aide annuelle de 100 milliards de dollars, et la création d’un fonds mondial pour la biodiversité. Celui-ci leur a été refusé, au profit d’un simple abondement du Fonds pour l’Environnement Mondial. La France soutenait cette position, alors même que les pays du Sud le jugent non-fonctionnel.
Enfin, une grande partie des objectifs posés ne sont ni datés ni chiffrés. C’est le cas pour la réduction de la pollution plastique, la transformation des secteurs productifs, ou encore la fin de l’extinction des espèces menacées par les activités humaines. Les bornes d’atteinte à 2030 sont largement supprimées, pour des objectifs finaux déplacés à 2050.
Or, l’expérience des derniers sommets prouve que les objectifs sont rarement atteints, et encore moins lorsqu’ils ne sont pas chiffrés. Sur les 20 objectifs établis en 2010 à Tokyo, aucun n’a été atteint à l’heure actuelle. Le cadre de suivi établi à Montréal est une piste intéressante, mais il ne dispose d’aucun mécanisme contraignant, ce qui le rendra très probablement inefficace.
Aussi, les député.es NUPES de la commission du développement durable demandent que les recommandations des ONG et des peuples autochtones soient suivies, pour éviter un nouveau grand sommet sans suites. Des objectifs chiffrés et datés doivent être ajoutés à la liste adoptée à Montréal. Des critères qualitatifs doivent compléter l’objectif de 30% de zones protégées, en suivant la définition de l’UICN. Des bornes intermédiaires à 2030 doivent être placées pour s’assurer de l’atteinte des objectifs.
La protection de la biodiversité est tout aussi essentielle que le climat. Elle est une condition essentielle à la survie de l’espèce humaine, et à la pérennité des écosystèmes. La crise qui nous menace concerne non seulement le climat, mais également la disparition de la biodiversité avec la sixième extinction de masse. Si les faits reprochés au gouvernement français dans la gestion des négociations sont avérés, ils sont très graves. Si la France a effectivement bloqué un accord international qui définit l’avenir de l’habitalité de notre planète, c’est non seulement insensé, mais aussi meurtrier.