Le Gouvernement vient d’annoncer son recours à l’article 49 alinéa 3 de la Constitution sur la 2ème partie du projet de loi de finances. C’est la 4ème fois en moins de deux semaines que le gouvernement fait le choix du passage en force.
Nous refusons la banalisation de l’article 49.3 comme une pratique normale du fonctionnement parlementaire. Une telle répétition illustre le mépris du pou- voir pour le travail parlementaire, une incapacité à convaincre et une utilisation de plus en plus autoritaire des mécanismes de la 5ème République.
Elle s’ajoute à la pratique du mensonge généralisé pour discréditer l’opposition des parlementaires face à ces coups de force répétés. Ainsi, le président de la République aura abaissé la parole présidentielle jusqu’à inventer de toutes pièces une alliance de la NUPES et du Rassemblement National qui n’existe pas et qui n’existera jamais : notre projet et notre vision de la société nous pla- cent en opposition frontale avec l’extrême-droite, dont les coups de communi- cation montrent surtout l’isolement et l’opportunisme.
En raison de ce nouveau 49 alinéa 3, l’Assemblée nationale n’a pu débattre que de cinq missions (Justice, Défense, Culture, Outre-mer et Écologie) sur les 34 que nous devions examiner. C’est donc seulement 15% des missions qui auront pu être discutées par les parlementaires. Le gouvernement cherche ici à masquer l’austérité généralisée pour le logement, la solidarité nationale, les services publics, l’école ou l’égalité entre les femmes et les hommes.
Il ne sera donc pas possible de discuter de l’augmentation du nombre d’ensei- gnants et de leurs salaires, de la titularisation des accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH), de la gratuité de toutes les fournitures et de tous les manuels scolaires. Ni de la revalorisation des APL de 10%, de l’augmentation des moyens pour le contrôle du respect de l’encadrement des loyers ou de la création de nouvelles places d’hébergement dédiées aux femmes victimes de violences. Quant au débat sur les finances locales, déjà esquivé lors de l’examen de la partie recettes du budget, il a été sciemment contourné par le gouvernement pour empêcher toute discussion sur l’impact pour les collectivités locales de la crise de l’énergie et de la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE).
Mais en plus d’empêcher des débats indispensables, ce 49 alinéa 3 balaye des avancées majeures votées par l’Assemblée Nationale ces derniers jours.
Ainsi, les amendements déposés par la NUPES et adoptés contre l’avis du Gouvernement avec le soutien de l’ensemble des députés ultramarins, pour augmenter de plus de 200 millions le budget des outre-mer sont tout bonnement supprimés. En dépit des milliards nécessaires, ces moyens permettaient de garantir le droit à l’eau, d’améliorer le droit au logement, de mettre en place un fond d’urgence sociale contre la vie chère ou de lutter contre l’érosion côtière. C’est un acte de mépris d’une violence inouïe pour nos com- patriotes ultramarins confrontés à des difficultés sociales et écologiques majeures.
De même, les amendements historiques adoptés par l’Assemblée Nationale dans la lutte contre le climat sont écartés sans ménagement. Les parlementaires avaient pourtant voté des mesures d’une ambition jamais atteinte ces dernières années, en choisissant de consacrer 12 milliards d’euros supplé- mentaires à la rénovation énergétique des bâtiments et 3 milliards d’euros au développement du fret ferroviaire, des petites lignes de train et des trains de nuit. Par cet acte, le gouvernement signe définitivement le caractère né- faste de son action face à l’urgence climatique.
C’est pourquoi, face à cette nouvelle brutalité contre les parlementaires et le peuple français, nous, députées et députés, déposons une motion de censure en application de l’article 49 alinéa 3 de la Constitution et des articles 153 et suivants du règlement de l’Assemblée nationale.