Intervention du député Michel LARIVE dans le cadre de la mission « MÉDIAS, LIVRE ET INDUSTRIES CULTURELLES » du projet de loi de finances pour 2021.
« Tandis que les obscurantismes semblent gagner du terrain et permet aux idéologies les plus nauséabondes d’innerver peu à peu la société française, nous avons le devoir de tout faire pour aiguiser l’esprit de nos concitoyennes et de nos concitoyens et réaffirmer les valeurs universalistes qui fondent notre République.
Nous ne pourrons atteindre cet objectif sans une politique culturelle ambitieuse qui favorise la diversité artistique en soutenant les créateurs et qui permette la plus large diffusion des œuvres possible. Cette politique culturelle inclut nécessairement le champ de la presse et des médias, qui doivent avoir des moyens suffisants pour accomplir leur œuvre d’information en toute liberté, sans subir de pressions qu’elles soient politiques ou économiques.
L’augmentation des aides à la presse prévue dans le programme 180 est salutaire dans le contexte actuel, mais elle ne saurait compenser les baisses successives observées depuis le PLF2018. Ces aides sont insuffisantes pour permettre un véritable pluralisme. Elles n’empêcheront pas l’érosion du nombre de quotidiens payants et gratuits, ni celle des magazines hebdomadaires d’information politique et générale.
Au-delà de la question des montants alloués, c’est notre système d’aide à la presse qui montre ses limites. Car ces fonds subventionnent sans contreparties quelques grands groupes et banques qui possèdent aujourd’hui la plupart des titres de presse.
Il faut repenser les aides à la presse pour permettre le maintien et la création de titres indépendants et garantir la liberté des rédactions vis-à-vis des financeurs. Ces aides devront s’accompagner de mesures en faveur du pluralisme et contre la concentration des médias.
Par ailleurs, les crédits alloués au Centre National du Livre restent constants. Or nous savons le rôle primordial que le CNL remplit en faveur de la création littéraire et de la diffusion des œuvres auprès du public. Il permet aux artistes-auteurs de s’affranchir du modèle économique de la rentabilité et de proposer des contenus originaux. Cette action en faveur de la création littéraire doit être mieux soutenue.
Enfin, si nous sommes pour l’élargissement des horaires d’ouverture des bibliothèques, qui favorise l’accès au livre, nous n’acceptons pas qu’il soit réalisé au détriment des bibliothécaires, qui sont de plus en plus fréquemment sollicités pour travailler le soir et le week-end.
En ce qui concerne le secteur audiovisuel public, vous nous proposez de poursuivre la cure d’austérité que vous avez lancée il y a deux ans, avec une baisse générale de 2,63%, en tenant compte de l’inflation. L’année dernière c’était 3,36% en moins et l’année précédente -2,56%.
Les conséquences pour France Télévision sont particulièrement préoccupantes, car à la baisse des crédits proposées s’ajoute une prévision de perte de chiffre d’affaire publicitaire de 55,1M€ par rapport aux prévisions initiales, et d’important surcoûts liés à la crise sanitaire.
De nombreux emplois sont menacés. La CGT France TV rapporte déjà une baisse d’un peu plus de 600 ETP par rapport au 30 juin 2019, soit une diminution de 6,81% des effectifs en une seule année. Et il faut s’attendre à ce que les plans sociaux se poursuivent.
Enfin les choix budgétaires proposés par ce Gouvernement paraissent en totale contradiction avec les orientations stratégiques présentées dans le projet annuel de performance.
En effet, comment faire de France TV « une référence en matière de fiabilité, de pédagogie et de mise en perspective des événements », sans, par exemple, lui fournir les moyens nécessaires pour financer le journalisme d’investigation, trop souvent sacrifié sur l’autel de l’immédiateté et du sensationnalisme ?
Tandis que l’objectif affiché est de renforcer l’ancrage de France TV auprès des jeunes publics, « avec des programmes à la fois ambitieux et accessibles, adaptés à chaque tranche d’âge », pourquoi programmer l’arrêt de France 4 ? Cette chaîne réalise d’excellentes audiences auprès des jeunes. Ca n’a pas de sens.
Enfin, où se trouve la cohérence quand vous dites vouloir tripler le volume horaire consacré aux programmes régionaux à horizon 2022, afin de favoriser la représentation des territoires et la proximité, de favoriser la parité et l’inclusion, mais que vous mettez fin à la diffusion des programmes de France Ô début septembre ?
Nous, députés du groupe parlementaire la France Insoumise, considérons que le texte proposé ne répond absolument pas aux défis à relever et manque clairement d’ambition. Nous voterons contre. »