Édito publié dans « La lettre Agriculture et Alimentation de la France insoumise » numéro 13 de janvier 2019 et préparé par l’équipe thématique Agriculture et Alimentation de la France insoumise.
La « déclaration des droits des paysans et autres personnes travaillant en zone rurale » a finalement été adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 17 décembre dernier à New-York. Cent vingt-deux pays, représentant 75 % de la population mondiale se sont prononcés en faveur du texte, huit ont voté contre et 54 pays se sont abstenus.
C’est une grande victoire pour les paysannes et paysans de la Via Campesina, l’un des plus grands mouvements sociaux du monde avec 250 millions de membres, qui a porté cet instrument international depuis près de vingt ans, et c’est une bonne nouvelle pour tous les producteurs d’aliments à petite échelle et les travailleurs ruraux, dont les conditions d’existence sont dans de nombreux cas extrêmement difficiles.
Hormis le Portugal, fidèle à son soutien à l’agriculture familiale et à l’engagement pris dans le cadre de la Coordination des Pays de Langue Portugaise (CPLP), et au Luxembourg qui ont soutenu la déclaration, la plupart des pays de l’Union européenne dont la France se sont abstenus. Les efforts ont pourtant été importants de la part de la délégation de Bolivie, qui présidait le processus, pour négocier le texte afin qu’il obtienne un vaste consensus, condition nécessaire à sa réelle utilisation par les pays l’adoptant.
Pour les organisations qui ont porté le plaidoyer pour la déclaration en France auprès des différents ministères concernés, la déception est réelle. « Après certains contacts, nous avons cru que la France pourrait voter en faveur », explique Pascal Erard, du Comité Français pour la Solidarité Internationale (CFSI) et de Coordination Sud, réseau des organisations françaises de solidarité nord-sud . Il précise que « la Commission nationale consultative des droits de l’homme, qui rassemble toutes sortes de personnalités a voté à l’unanimité un avis en soutien à la déclaration. Malgré cela, la France est restée sur une position frileuse ». Pour Geneviève Savigny de la Confédération paysanne, « la France a bloqué essentiellement sur le droit aux semences, et se trouve en pleine contradiction entre la défense de la transition agroécologique et celle des intérêts de l’industrie semencière ».
Difficile de défendre « en même temps » les paysans du monde y compris les plus modestes, et les accords de libre échange.
Difficile de se présenter comme le pays leader de l’agroécologie, de présenter une personnalité française au poste de Directeur général de la FAO (Catherine Geslain-Lanéelle a été proposée par la France comme unique candidate de l’Union Européenne au remplacement de l’actuel directeur Jose Graziano Da Silva), et de s’abstenir de soutenir un instrument international à même de renforcer le rôle des premiers garants de la sécurité et de la souveraineté alimentaire, les paysannes et les paysans.
Nous dénonçons cette attitude de la France. Encore une fois est démontré que, derrière le « en même temps », c’est bien le camp de l’agrobusiness et de la finance qui, au moment des choix finaux, est défendu et représenté par le gouvernement Macron-Philippe.
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Au sommaire ce mois-ci
Page 1 - Edito - Les droits des paysans reconnus !…mais pas par la France
Page 2 - Chambres d’agriculture : occasion ratée de refondre une gouvernance biaisée
Page 2 - L’ANDES en redressement judiciaire
Page 3 - Quand le Conseil Constitutionnel sabre la loi Agriculture et Alimentation
Page 4 - Des nouvelles du groupe parlementaire - A lire : Paul Ariès