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PROPOSITION DE LOI

visant à faire de l’assistance médicale à la procréation
un
droit universel,

(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Danièle OBONO, Bastien LACHAUD, Clémentine AUTAIN, Ugo BERNALICIS, Éric COQUEREL, Alexis CORBIÈRE, Caroline FIAT, Michel LARIVE, Jean-Luc MÉLENCHON, Mathilde PANOT, Loïc PRUD’HOMME, Adrien QUATENNENS, Muriel RESSIGUIER, Sabine RUBIN, François RUFFIN, Bénédicte TAURINE, M’jid EL GUERRAB,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

En France, l’assistance médicale à la procréation se définit dans le code de la santé publique comme ayant pour objet de « remédier à l’infertilité d’un couple ou d’éviter la transmission à l’enfant ou à un membre du couple d’une maladie d’une particulière gravité ». Il est précisé que « le caractère pathologique de l’infertilité doit être médicalement diagnostiqué ». Et que « L’homme et la femme formant le couple doivent être vivants, en âge de procréer et consentir préalablement au transfert des embryons ou à l’insémination ».

Ces dispositions instaurent donc de fait une discrimination envers les femmes célibataires, les couples de femmes et les hommes trans qui pourraient bénéficier d’une assistance médicale à la procréation. Ajoutons que dans les faits, même lorsque l’infertilité n’est pas médicalement expliquée, le projet de parentalité et la déclaration d’essais infructueux peuvent déterminer la mise en place d’une aide médicale. Par contre, les femmes qui ne sont pas dans un couple hétérosexuel, même celles souffrant d’infertilité médicalement diagnostiquée, n’y ont pas accès.

De plus, l’adoption à titre individuel est possible depuis la loi du 11 juillet 1966 et elle est ouverte aux couples de femmes mariées depuis la loi du 17 mai 2013. Si le législateur ou la législatrice souhaite mettre en cohérence la reconnaissance de toutes les familles (monoparentales, homoparentales…) avec le reste du droit, il ou elle doit mettre un terme à cette discrimination.

Notre proposition de loi veut mettre fin à une incohérence juridique mais aussi à l’écart entre les faits et la loi : le recours à l’assistance médicale à la procréation au-delà des critères retenus dans la loi est déjà une réalité. Des milliers de femmes se rendent en effet chaque année par leurs propres moyens chez nos voisins européens, ou s’en remettent à des techniques artisanales dangereuses, pour fonder une famille. Cette situation crée des risques sanitaires graves et renforce les inégalités sociales.

La présente proposition de loi entend donc étendre les applications du principe d’égalité des droits de chaque citoyen et citoyenne devant la loi en ouvrant l’assistance médicale à la procréation, remboursée par la sécurité sociale, à toute personne ayant un projet de parentalité et voulant en bénéficier.

L’article 1 fixe les critères d’accès à l’assistance médicale à la procréation.

Les articles 2 à 4 modifient les règles régissant l’implantation d’embryons. L’interdiction du double don, anciennement disposée à l’article L. 2141-3 du code de la santé publique, est abrogée.

Les articles 5 et 6 modifient les règles d’accueil du projet parental d’un couple.

L’article 7 modifie l’article L. 2141-10 pour le mettre en conformité avec les nouvelles dispositions de l’article L. 2141-2.

L’article 8 est un article de cohérence.

Les articles 9 et 10 rendent possible pour un donneur ou une donneuse de gamètes de choisir la levée éventuelle de son anonymat et disposent de l’accès à l’identité du ou des donneurs ou donneuses de gamètes.

Les articles 11 et 12 sont des articles de mise en cohérence du droit de la filiation au vu des changements apportés par la présente proposition de loi à l’assistance médicale à la procréation.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

L’article L. 2141-2 du code de la santé publique est ainsi rédigé :

« Art. L. 2141-2. –Le prélèvement de gamètes est ouvert aux personnes majeures jusqu’au jour qui précède leur quarante-sixième anniversaire.

« La demande d’implantation d’embryons ou d’insémination de gamètes est ouverte aux personnes majeures jusqu’au jour qui précède leur quarante-sixième anniversaire.

« L’implantation d’embryons ou l’insémination de gamètes peut être effectuée chez les personnes majeures jusqu’au jour qui précède leur quarante-huitième anniversaire. »

Article 2

L’article L. 2141-3 du même code est ainsi rédigé :

« Art. L. 2141-3. – Les embryons surnuméraires peuvent être cryoconservés en vue de la réalisation du projet parental ou d’un projet parental ultérieur.

« Dans le cas où la cryoconservation n’a pas été effectuée aux fins prévues au premier alinéa, les embryons surnuméraires peuvent :

– être intégrés dans un protocole de recherche scientifique dans les conditions prévues à l’article L. 2151-5 ;

– être détruits ;

– être affectés à un programme de don d’embryon. »

Article 3

L’article L. 2141-4 dudit code est ainsi rédigé :

« Art. L. 2141-4. – Sous réserve d’une indication médicale, il ne pourra être procédé à de nouveaux prélèvements de gamètes pour constituer d’autres embryons tant que le ou les auteurs et autrices du projet parental disposent encore d’embryons surnuméraires cryoconservés, pour autant que ceux-ci satisfassent aux normes sanitaires requises.

« L’appréciation de la sécurité sanitaire des embryons surnuméraires est effectuée par le centre de fécondation consulté. »

Article 4

L’article L. 2141-5 du même code est ainsi rédigé :

« Art. L. 2141-5. – Dans l’hypothèse où les auteurs et autrices du projet parental avaient cryoconservé des embryons surnuméraires en vue d’un projet parental ultérieur et pour autant qu’elles et ils l’aient expressément prévu dans la convention mentionnée à l’article L. 2141-6, l’implantation post mortem d’embryons surnuméraires est possible. »

Article 5

L’article L. 2141-6 dudit code est ainsi rédigé :

« Art. L. 2141-6. – Préalablement à toute démarche médicale relative à la procréation médicalement assistée, le ou les auteurs et autrices du projet parental et le centre consulté établissent une convention.

« La convention mentionne les informations relatives à l’identité, l’âge et l’adresse du ou des auteurs et autrices du projet parental et les coordonnées du centre consulté.

« Lorsqu’il s’agit d’un couple, la convention est signée par les deux auteurs et autrices du projet parental.

« La convention est rédigée en deux exemplaires, l’un destiné au centre, l’autre à l’auteur ou aux auteurs et autrices du projet parental. »

Article 6

L’article L. 2141-7 du même code est ainsi rédigé :

« Art. L. 2141-7. – Les instructions du ou des auteurs et autrices du projet parental peuvent être modifiées jusqu’à l’accomplissement de la dernière instruction donnée, sous réserve de l’expiration du délai de conservation des gamètes ou des embryons surnuméraires.

« Ces modifications font l’objet d’un document écrit, signé par toutes les parties signataires à la convention visée à l’article L. 2141-6.

« Lorsqu’il s’agit d’un couple, ces modifications doivent être faites de commun accord et le document écrit visé à l’alinéa précédent est signé par les deux auteurs, autrices du projet parental. »

Article 7

L’article L. 2141-10 dudit code est ainsi modifié :

I. – Au 1°, les mots : « de l’homme et de la femme formant le couple » sont remplacés par les mots : « de l’auteur, autrice ou des auteurs, autrices du projet parental ».

II. – Au début du dernier alinéa, les mots : « Les époux, les partenaires liés par un pacte civil de solidarité ou les concubins » sont remplacés par les mots : « l’auteur, l’autrice ou les auteurs ou autrices du projet parental ».

Article 8

Au dernier alinéa de l’article L. 2122-2 du même code, les mots : « du père » sont remplacés par les mots : « de l’autre parent ».

Article 9

I. – L’article 16-8 du code civil est ainsi rédigé :

« Art. 16-8. – Aucune information permettant d’identifier à la fois la personne qui a fait don d’un élément ou d’un produit de son corps et la personne qui l’a reçu ne peut être divulguée si cette divulgation n’est pas autorisée par la loi. De même la personne donneuse ne peut accéder à l’identité de la personne receveuse ni la personne receveuse à celle de la personne donneuse si ces accès ne sont pas autorisés par la loi.

« Toutefois, en cas de nécessité thérapeutique, les médecins de la personne donneuse et de la personne receveuse peuvent demander à avoir accès aux informations permettant l’identification de ceux-ci. »

II. – L’article L. 1211-5 du code de la santé publique est ainsi rédigé :

« Art. L. 1211-5. – Aucune information permettant d’identifier à la fois la personne qui a fait don d’un élément ou d’un produit de son corps et la personne qui l’a reçu ne peut être divulguée si cette divulgation n’est pas autorisée par la loi. De même la personne donneuse ne peut accéder à l’identité de la personne receveuse ni la personne receveuse à celle de la personne donneuse si ces accès ne sont pas autorisés par la loi.

« Toutefois, en cas de nécessité thérapeutique, les médecins de la personne donneuse et de la personne receveuse peuvent demander à avoir accès aux informations permettant l’identification de ceux-ci. »

Article 10

L’article L. 1244-7 du code de la santé publique est ainsi rédigé :

« Art. L. 1244-7. – Le don de gamètes est anonyme. La personne donneuse peut, au moment du don, autoriser que l’anonymat soit levé. La ou les personnes receveuses sont informées qu’elles peuvent recourir soit à un don dont la levée de l’anonymat a été autorisée, soit à un don dont l’anonymat ne peut pas être levé.

« Seul l’enfant, la personne majeure née du don peut demander à connaître l’identité de son ou ses donneurs. Toutefois, si la personne est décédée, ses descendants et descendantes en ligne directe majeurs peuvent demander à connaître l’identité du ou des donneurs.

« La communication est de droit.

« Le Conseil national d’accès aux origines personnelles est seul habilité à recueillir cette identité auprès de l’organisme chargé de la préserver. »

Article 11

L’article 311-20 du code civil est ainsi rédigé :

« Art. 311-20. – La convention mentionnée à l’article L. 2141-6 du code de la santé publique emporte reconnaissance prénatale au sens de l’article 316 du présent code ».

Article 12

I. – L’intitulé du paragraphe 1 de la section 1 du chapitre II du titre VII du livre Ier du code civil est supprimé.

II. – L’article 311-25 du même code est ainsi rédigé :

« Art. 311-25. – La filiation est établie, à l’égard de la personne ayant accouché de l’enfant, par la désignation de celle-ci dans l’acte de naissance de l’enfant. »

III. – L’article 325 dudit code est abrogé.

Article 13

I. – La charge pour l’État est compensée à due concurrence par la création de taxes additionnelles aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

II. – La charge qui pourrait résulter de l’application de la présente loi pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la majoration des droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

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