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Quand Macron encourage le travail détaché

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En octobre 2017, Emmanuel Macron et son gouvernement se félicitaient d’un prochain accord ambitieux sur les travailleurs détachés. Un pas de plus vers « l’Europe qui protège » d’après eux. Depuis leur élection, ils faisaient en effet du détachement et de la lutte contre le dumping social, son véritable cheval de bataille.

Pourtant, 9 mois plus tard, aucun accord n’est trouvé entre le Parlement, la Commission et le Conseil de l’Union européenne. Les réunions se succèdent en toute opacité. A ce jour, aucun élément ne laisse présager à un accord ambitieux qui mettrait fin aux pratiques de dumping social et d’exploitation des salariés détachés.

Pire encore, alors que le dumping social s’étend en Europe, Emmanuel Macron l’organise au niveau national avec sa panoplie d’ordonnances sur le droit du travail qui mettront en concurrence les salariés. De plus, il encourage le travail détaché : l’inversion de la hiérarchie des normes va donner plus de poids aux conventions collectives d’entreprise qui, rappelons-le, ne s’appliquent pas aux salariés détachés. Grâce aux ordonnances Macron, ces derniers vont être financièrement plus attractifs pour le patronat, vont tirer vers le bas le niveau des salaires, et vont être moins payés à travail égal. Emmanuel Macron est un tartuffe, qui prétend vouloir plus protection mais organise en réalité un nouveau système d’exploitation des salariés détachés.

La question de la rémunération ne sera visiblement pas résolue par la nouvelle directive détachement. Mais derrière, se pose toujours la question des cotisations sociales. Alors que la Commission, le Conseil et le Parlement s’attèlent à définir le concept de rémunération, personne ne parle de la révision du règlement européen 883 sur la sécurité sociale : chaque État membre peut librement encourager le détachement de travailleurs en diminuant les cotisations sociales, sans se préoccuper des conséquences ! Ainsi, au 1er janvier 2018, la Roumanie a supprimé l’intégralité des cotisations sociales patronales. C’est bien sûr injuste : seuls les salariés supportent désormais les risques que cause le marché du travail (chômage, accidents, maladie…) ! Les salariés roumains vont accuser une baisse de 11% de leur salaire net afin de financer le système de sécurité sociale, alors même que le salaire minimum en Roumanie est de 180 euros. Et une fois détachés en Europe de l’Ouest, après cette coupe des cotisations sociales, ils creusent encore l’écart avec les salariés locaux. Une convergence de l’Europe vers le haut, disaient-ils ?

Tout cela modère considérablement le discours triomphaliste d’Emmanuel Macron sur le détachement. Dans un tel contexte, où la fraude est généralisée, où les acquis sociaux sont mis en concurrence, où les travailleurs détachés sont exploités, il est temps « de cesser unilatéralement d’appliquer la directive sur le détachement de travailleurs en France » comme le prévoit L’Avenir en Commun, considérant que « la législation nationale doit s’appliquer totalement, y compris concernant les cotisations sociales patronales et salariales ». Dans ce climat politique marqué par la montée du nationalisme, la précarisation de l’emploi, la paupérisation des populations, l’augmentation du chômage, l’Europe est une partie du problème, lorsqu’elle protège les entreprises frauduleuses au lieu des citoyens qui travaillent.

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