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Budget 2018 : La fête de l’oligarchie

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PLF 2018

Nicolas Sarkozy et François Hollande se sont disputés pendant dix ans le titre de « président des riches ». Aujourd’hui ils ont un challenger qui risque de rafler la mise. En quelques mois, Emmanuel Macron a engagé une série d’attaques contre notre modèle social d’une violence inouïe.

Le budget de l’État pour 2018 (Projet de Loi de Finances, PLF) ne laisse aucune ambiguïté. Il montre que la priorité du gouvernement Philippe et du président Macron est de satisfaire les demandes de l’oligarchie.

Rien n’est assez pour les riches

Le candidat Macron avait promis aux plus fortunés deux réformes particulièrement juteuses : la refonte de l’impôt sur la fortune (ISF) et la création d’une flat tax (taxe unique) sur les revenus issus du capital. Des mesures qui représentent un gain de pouvoir d’achat de 5 milliards d’euros pour les plus fortunés selon le Ministère des Finances.

Selon le PLF, l’ISF sera supprimé et remplacé par l’IFI (Impôt sur la fortune immobilière) qui taxera seulement la richesse immobilière. Cette mesure, ciblée sur les 1 % plus riches, est censée orienter l’investissement des plus fortunés vers les activités productives et risquées. Elle répond à la fameuse « théorie du ruissellement » selon laquelle les revenus des plus fortunés financent l’investissement et l’emploi des « gens qui ne sont rien ».

En fait les études statistiques montrent que la croissance des inégalités nuit à l’efficacité du système productif. Pire, le nouvel IFI proposé par le gouvernement exonère de fiscalité la détention d’actions, d’obligation, mais aussi les fonds placés à l’étranger ou utilisés pour acheter des biens de luxe (yachts, voitures de luxe, etc.). Ainsi, les fonds dégagés par la collectivité pourront se retrouver dans la consommation somptuaire des plus riches ou fructifier dans le paradis fiscal de leur choix.

Macron contre l’impôt progressif

Le PLF inclut aussi un Prélèvement Forfaitaire Unique (PFU) sur les revenus du capital. Les revenus issus du capital pourront être taxés au choix au barème de l’impôt sur le revenu ou au PFU fixé à 30 %. Le PFU permettra de se libérer de l’impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux (CSG et CRDS).

Comme les prélèvements sociaux sont déjà proportionnels, les gains pour les contribuables dépendront de leur tranche d’impôt sur le revenu qui, lui, est progressif. Ainsi, avec le PFU les gagnants seront ceux qui pourront échapper aux tranches supérieures de l’impôt. Selon une évaluation réalisée par l’OFCE, seuls les 5 % des ménages avec le plus haut niveau de vie auront intérêt à choisir cette « flat tax ».

Les choix pour les plus riches et la finance ne s’arrêtent pas à ces deux mesures phares. Du côté des entreprises les grands groupes vont aussi bénéficier de l’attention du président jupitérien. Ainsi, la taxe additionnelle sur les dividendes et le rachat d’actions sera abrogée, tout comme la taxe sur les très hauts salaires dans la finance et l’assurance.

Le Ministère des Finances estime que le programme de Macron va augmenter les profits des entreprises de 8 milliards, dont 4 milliards bénéficieront aux grands groupes et 1 milliard aux PME.

Les classes populaires au régime sec

Si quantitativement les baisses d’impôts sur le capital sont les plus importantes, le gouvernement centre sa communication sur l’exonération de taxe d’habitation pour 80 % des ménages. Aujourd’hui 15 % des familles sont déjà exemptées de cet impôt. Cette mesure est censée bénéficier aux fameuses classes moyennes.

Contrairement à la célérité affichée pour les gestes aux plus riches, cette mesure sera étalée sur 3 ans alors que l’ISF est réformé en un an. La taxe d’habitation est un impôt injuste et rempli de contradictions mais cette étatisation sans garanties peut remettre en question l’autonomie financière des collectivités locales, déjà mise à mal par l’austérité. Et elle ne règle en rien le manque de progressivité de l’impôt sur le revenu.

Si le PLF 2018 peut cajoler les riches c’est parce que les classes populaires vont se serrer la ceinture. Les 10 milliards des baisses de fiscalité du PLF 2018 seront financées par des baisses de la dépense publique, et notamment celles qui ciblent les classes populaires.
Dans le budget de l’État, deux missions font particulièrement les frais de la foudre jupitérienne : le logement et les emplois aidés. Les APL seront une nouvelle fois baissées pour les résidents dans le parc social (de l’ordre de 50 euros par mois pour réaliser 1,7 milliards d’économies). Le gouvernement explique que les coupes n’auront pas d’impact sur le pouvoir d’achat des familles car les bailleurs sociaux devront réduire leurs loyers.

Toutefois, cela obligera les bailleurs sociaux à rogner leur budget d’entretien ou de construction. Et, à la fin ceci se traduira par une perte de qualité de vie pour les habitants des HLM et des familles devront se loger plus cher dans le parc privé.

Le PLF, prévoit également une amputation du budget de la politique de l’emploi de 1,5 milliard d’euros. Dans le viseur les emplois aidés jugés inutiles et inefficaces. Or ces contrats aidés solvabilisent des tâches d’intérêt général, notamment dans les associations, et ciblent des personnes éloignées du marché du travail. Leur passage de 320 000 en 2017 à 200 000 en 2018 constituera le plus grand plan social de l’histoire du pays : 120 000 emplois détruits !

Le service public dans le viseur

Les économies seront massives aussi pour l’assurance maladie : 4,2 milliards d’euros. L’hôpital public en fera les frais alors qu’il est le dernier filet de protection pour les publics fragilisés par la crise. À ceux qui s’inquiètent de l’augmentation (2 euros) du forfait hospitalier, le Macron réplique que les français ne souffriront pas de cette mesure car ils sont couverts par une assurance complémentaire prenant en charge cette dépense. Il veut ignorer que nombre de français n’ont pas les moyens de cotiser à assurance complémentaire. Et surtout que les mutuelles ont annoncé qu’elles devront augmenter leurs tarifs pour faire face à ce nouveau coût. Ainsi, la contribution sociale (publique) restera inchangée mais les frais de mutuelle (privés) augmenteront.

Enfin, les collectivités locales devront à nouveau réduire leurs frais de fonctionnement en 2018 (2,6 milliards). Cette maîtrise sera d’autant plus simple que le PLF prévoit des nouvelles attaques envers la fonction publique : gel du point d’indice, rétablissement du jour de carence et nouvelle baisse des effectifs en vue. Le service public garant de l’intérêt général sera encore fragilisé pour servir les intérêts particuliers des plus nantis. Robin des bois à l’envers en somme.

Raul S. Alquier

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Illustration par Karak
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