Le 18 mars est notre repère. La marche pour la Sixième République ouvre un moment politique à part entière. Son objet contient le sens du moment politique. Sommes-nous capables de transformer en énergie positive les miasmes de la décomposition politique en cours ? La marche se présente donc comme un moment dans une campagne qui est elle-même pensée non comme un évènement de promotion d’un candidat ou d’un parti, au contraire de tous les autres, mais comme une construction politique. Serons-nous entendus ?
J’y crois, si j’en juge par l’arrivée de 50 000 nouveaux appuis en un mois sur la plateforme du mouvement et la bonne séquence de campagne que nous avons eu ce mois de février. En dépit des engluements qui ont suivi la fin de la primaire du PS et des innombrables manœuvres d’appareils à laquelle tout cela a offert un terrain de jeu propice, nous avons développé nos thèmes, tenu nos meeting de masse, publié notre travail, tenu plus d’une centaine de réunion de terrain. Sans aucun appui extérieur à lui, notre mouvement a su tenir les meetings de l’hologramme à Lyon et Paris, ceux de Strasbourg et de Brest, la journée télévisée du chiffrage du programme, celle de la journée écologie, toute choses dans le fil fixé : la présentation du programme envers et contre tout pour construire une opinion rassemblée sur des idées claires.
La création extraordinaire du guide LAEC.fr et la bande dessinée qui le résume sont les deux apports remarquables à tous points de vue venus de notre sphère d’implication citoyenne. Le succès de notre université populaire en ligne montre comme est grand l’appétit de savoir et de comprendre. Et comme sont dérisoires les jeux de pression politicienne auxquels nous avons été soumis sans relâche. Le mois de mars, est encore un mois de pleines turbulences. Je n’y vois pas d’autre façon d’agir que de passer à un niveau plus élevé d’action de masse dans lesquels la campagne et le projet politique fusionnent en un processus unique de mobilisation populaire. C’est cela la méthode de la marche du 18 mars.
Les démêlés de François Fillon ont plombé toute la campagne ! Ils ont submergé le devant de la scène médiatique à laquelle ils ont servi son matériau favori : un feuilleton quotidien avec du sang, des traitres, de la turpitude en politique. Cette situation bloque tout débat face à la droite qui reste tout de même une composante centrale de la vie démocratique de notre pays. La paralysie s’est étendue : que dire, que faire, tandis que le récit de chaque démêlé de François Fillon occupe tout l’espace, réduit à néant la visibilité de tout effort, de toute initiative porteuse d’un tant soit peu de contenu ?
Je fais un meeting à Brest archi-comble, je m’y exprime longuement sur les retraites et la sécurité sociale intégrale ? J’en cherche la trace. Le lendemain une visite de chantier naval ? Il n’en reste que ma réponse aux questions sur la dernière déclaration de Fillon. Une logique circulaire de situation médiatique encastre tout dans un présent glauque. Ainsi va la campagne. Et le pire arrive quand l’officialité met en mouvement ses grandes orgues. Ainsi quand Pujadas se perd en adjurations psychologisantes face a Macron (« êtes vous prêt a présider ? ») après que son compère Lenglet ait salué « la cohérence » de son programme. Ni l’un ni l’autre n’écoutent ce que Macron est venu dire. Ni l’un ni l’autre ne pensent à l’interroger sur ce qu’il vient de dire à propos des retraites, quoiqu’ils diffusent une infographie complaisante. Macron prend le temps de dire qu’il s’agit d’une reforme structurelle. Il avance même des mots. Les deux divertissants n’y voient que du feu. Macron annonce les retraites par point et ils laissent passer ! Alors qu’il s’agit de la fin d’un système en place depuis soixante-dix ans. Parce qu’ils ne connaissent pas le sujet ? Parce que cela ne les intéresse pas ? Parce qu’ils ont leurs consignes ?
Certes ceux-là sont connus pour leurs pentes et l’émission politique qu’ils ont faite avec moi y a bien ajouté. Mais qui échappe à cette ambiance ? La sphère médiatique donne l’impression de se désintégrer en même temps que la sphère politique avec laquelle elle vit en symbiose. Celle des sondages ne vaut guère mieux. Un exemple parmi tant d’autres. Celui où l’hypothèse Juppé est rajoutée dans le tableau. Il me prendrait alors quatre points et pas un à Macron ! Comprenne qui peut quelle mixture, « secret industriel », permet un tel résultat ! D’une façon générale, les sondages lissent des résultats bruts eux-mêmes de plus en plus complexe à obtenir tant les personnes répugnent à répondre, surtout en milieux populaires. Dans mon cas, le lissage se fait avec les résultats de 2015. Je me demande bien lesquels puisque les listes « Front de gauche » sont pour l’essentiel des listes du PC en 2015. Mais comme elles font entre 3 et 5% on devine l’effet que cela produit sur le « lissage ». De son côté, le candidat du PS est lissé avec ces résultats de 2015, nettement plus élevés. Mais aussi avec ceux de Hollande en 2012 qui arrivait quand même au double des suffrages attribués aujourd’hui au PS.
Ainsi donc, maintes impressions les plus folles saturent le champ des émotions suggérées au peuple qui vote. Ce n’est pas franchement nouveau si on fait le bilan des sketchs antérieurs où sondeurs et commentateurs ont déjà bien brassé du vent que les faits ont démentis. Mais ce qui inquiète c’est qu’en aparté chacun reconnaît qu’il ne sait pas où va le fond du pays. Et que chacun d’entre nous aussi observe des tendances de toutes sortes sans rapport avec ce que nous dit l’officialité.