Un article du groupe thématique Enseignement supérieur et Recherche de la France insoumise
Avec Parcoursup, le gouvernement macroniste a confié l’avenir de nos jeunes à une procédure défaillante et inégalitaire. Parcoursup, en rendant toutes les filières du supérieur sélectives, a servi à masquer un manque d’investissement, devenu chronique, dans l’enseignement supérieur public, et le fait que des portes, ouvertes auparavant, se sont fermées devant un certain nombre de lycéens ou d’étudiants en réorientation.
Parcoursup a encore frappé !
Les futurs bacheliers et leurs parents, comme ces étudiants, se retrouvent confrontés à une procédure cryptée dont les principes sous-jacents ne sont jamais explicités.
Alors que les élèves de terminale sont censés préparer les épreuves du baccalauréat sereinement, les voici pendus devant leur téléphone portable à scruter leur position sur les listes d’attente, dans l’incapacité encore et toujours, à quelques jours de l’épreuve de philosophie, de se projeter dans un avenir pourtant proche !
Il n’y a que ceux qui ont la chance d’avoir obtenu véritablement satisfaction ce 2 juin (c’est-à-dire une place acquise dans la filière et la ville de leur choix et non pas une réponse positive à un choix de secours, propice à l’échec) qui peuvent être sereins. Combien sont-ils ces heureux élus, quel pourcentage représentent-ils sur la totalité des potentiels admis ? Impossible à dire puisque les vœux ne sont plus hiérarchisés, et certains très éloignés de leur intérêt véritable.
La plupart subissent une longue attente et en sont réduits à une consultation compulsive de l’application, puisqu’il faut répondre très vite à ce qui finalement leur reviendra dans ce jeu du hasard sans nécessité, soumis aux validations ou refus des uns et des autres, selon des critères locaux qui peuvent être différents pour des filières équivalentes. Pourtant, il y a peu, leurs aînés, en obtenant le bac, premier grade universitaire, jouissaient du droit à l’inscription en licence dans la filière de leur choix, et seul le manque d’investissement dans le supérieur avait déjà réduit certaines filières comme les STAPS à la non-solution du tirage au sort.
Parcoursup, bienvenue dans le monde d’après
Parcoursup était là, nous avait-on dit, pour régler les problèmes de la plate-forme précédente, APB (Admission Post Bac) et ces malheureux tirages au sort qui ne concernaient que 0,5 % des élèves. On nous apprend aujourd’hui qu’il ne fait rien de mieux, et fait pire en réalité, en coûtant plus cher. Et même, comble de la consternation, que la proportion de candidats n’ayant reçu aucune proposition lors de l’ouverture de la plate-forme est passé de 19% pour APB en 2016 à 46% pour Parcoursup en 2021.
Ces derniers chiffres proviennent du ministère et sont disponibles dans le récent rapport « Parcoursup : une génération « en attente », 100 M€ pour tout changer sans rien régler » du collectif « Nos Services publics », qui est sans appel : on a désorganisé l’Éducation nationale et l’Enseignement supérieur pour un résultat pitoyable. C’est surtout le principe même de l’orientation qui a été dévoyé en passant d’une logique d’affectation des futurs étudiants en fonction de leur choix à une « logique de « file d’attente » selon leur classement », puisque les candidats ne peuvent hiérarchiser leurs vœux selon leur préférence.
Il faudrait ajouter à cela la pression psychologique continue occasionnée par cette procédure, qui commence dès la fin de la classe de seconde. Était-il vraiment nécessaire de charger encore la barque de notre jeunesse, déjà remplie des angoisses écologiques et sociales, héritages d’une série de gouvernements aveugles à ces enjeux ?
Pour les parents, le Parcoursup du combattant
Une question se pose dans ce processus : les parents ont-ils bien joué le jeu de Parcoursup ? Ont-ils suffisamment rappelé à leur enfant l’importance de la future procédure et de son caractère fatidique chaque matin et chaque soir ? L’angoisse est partagée, l’aide apportée nécessairement inégale, et donc inégalitaire car discriminante pour la suite.
La plupart du temps, les parents, et surtout les mères, se sont investis autant qu’ils pouvaient, n’hésitant pas à corriger voire à écrire les lettres de motivation, à préparer les CV des lycéens (quel est l’intérêt d’un « CV » quand on a 17 ou 18 ans ?). Mettant parfois, sans même s’en rendre compte, la pression sur leurs enfants sous la menace de ne voir aucun vœu satisfait dans Parcoursup, perspective qui finalement apparaît presque plus effrayante que celle d’un échec au Baccalauréat. Ils partagent volontiers les angoisses de leur enfant puis leur désarroi, auxquels s’ajouteront bientôt les leurs : trouver un logement, de quoi financer les études, etc. Tout cela évidemment, quand l’algorithme voudra bien leur indiquer quel sera l’avenir qui leur a été choisi.
Les plus malchanceux des candidats seront livrés à eux-mêmes, heureusement souvent aidés par leurs professeurs dans leur lycée, mais l’injustice se répète encore et toujours, on n’y peut rien c’est comme ça, il n’y aurait pas d’alternative paraît-il.
Parcoursup, le totem d’un système défaillant
Finalement, on nous le dit, la grande majorité d’entre eux obtiendront une proposition (94% des néo-bacheliers selon le Comité éthique et scientifique de Parcoursup), même si c’est parfois en septembre, donc déjà très, trop tardivement pour une entrée en études sereine. Beaucoup restent aussi malgré tout sur le bord du chemin ou disparaissent des statistiques en quittant la procédure avant la fin, et les pourcentages donnés ne paraissent bons que si on ne s’y attarde pas trop. Pour les soi-disant heureux élus, il s’agit beaucoup trop souvent d’une place par défaut, donc peu propice à la réussite. Certains se lasseront au bout de quelques jours, quelques semaines, quelques mois… D’autres reprendront le chemin de Parcoursup pour tenter une réorientation et seront bien souvent évincés ou à nouveau placés dans une filière qui n’est pas celle de leur choix.
Un monstre aux pieds d’argile
Parcoursup peut apparaître comme le Léviathan chargé de réguler notre système éducatif, c’est en réalité surtout un monstre froid et violent capable de remettre en question les projets d’avenir de trop nombreux jeunes. Il ne faut pas s’y tromper, le Léviathan n’est rien d’autre ici que l’expression d’une volonté politique. Cette politique, qui satisfait certains, a choisi d’identifier le futur citoyen comme devant être récompensé ou puni, et finalement de lui imposer une destinée. Elle a préféré verrouiller les voies d’accès à l’enseignement supérieur, plutôt que de répondre aux besoins croissants liés à la hausse démographique. Mais le Léviathan est aussi une entité mortelle qui doit maintenant disparaître pour le bien de tous, élèves, parents et acteurs de l’éducation afin de laisser place à une véritable politique d’orientation et à une reconstruction de l’Éducation nationale et de l’Enseignement supérieur. Il faut désormais rompre avec cette politique éducative au rabais, ces recrutements précaires en « Job dating » de 30 minutes, cette « merveilleuse » idée de mise en concurrence stérile des élèves, des étudiants et des établissements entre eux qu’on veut nous imposer comme seule solution pérenne. Nous voulons un système nouveau et efficace qui permettra la réussite dans les filières générales et professionnelles, sans sacrifier les vocations les, rêves ou les envies de chacun et chacune. C’est celui que nous souhaitons promouvoir parce que notre jeunesse ne peut plus être sacrifiée sur l’autel d’une pseudo-rentabilité de l’éducation et de sa supposée efficience au service du seul marché du travail.
La disparition de Parcoursup ne sera que le point de départ de ce nouveau système, qui doit être refondé sur les principes de droit d’accès à l’enseignement supérieur et à la poursuite d’études, sur la gratuité de cet enseignement supérieur, sur un maillage territorial et un cadrage national des diplômes qui puissent garantir cet accès à tous et toutes. Cela nécessitera un investissement massif que la Nouvelle Union Populaire s’engage à faire, et une concertation large sur la base de ces principes : le temps est venu où l’on doit considérer l’éducation non comme une regrettable dépense pour le présent, mais comme un véritable investissement pour l’avenir.