Depuis le 17 avril, 3 académies expérimentent la mise en place de petits déjeuners gratuits dans les établissements d’enseignement primaire, situés en zone d’éducation prioritaire. Le gouvernement annonce remédier à une situation atroce : un écolier sur 10 en zone classée REP va à l’école le ventre vide. Cependant, cette réponse est clairement irréfléchie et inadaptée, un coup de com’ de plus.
Tout d’abord, la collation à l’école primaire existe déjà dans de nombreux établissements, via différents programmes tels « un fruit pour la récré ». L’ANSES (Agence Nationale de Sécurité Sanitaire, de l’Alimentation, de l’Environnement et du Travail) s’était penchée sur le sujet en 2004. Elle avait jugé que la collation scolaire du matin ne répondait pas de manière adaptée à l’absence de petit déjeuner, car l’apport nutritionnel de cette collation était trop élevé pour les enfants ayant déjà pris un petit déjeuner. Le programme de petit déjeuner gratuit proposé par le Gouvernement va donc à rebours des recommandations de l’ANSES qui consistaient à ne pas alimenter deux fois les enfants ayant déjà pris un petit-déjeuner à domicile, pour limiter la prévalence de l’obésité.
Plutôt qu’un programme de communication présentant des risques pour la santé des enfants, le développement d’un programme d’éducation nutritionnel universel et ambitieux est nécessaire. Il apparait également urgent de stopper la précarisation constante des familles les plus pauvres, afin que chaque enfant puisse prendre un petit déjeuner à la maison.
Le gouvernement a également planifié d’ici la fin du mois d’avril la « cantine à 1 €» dans 10 000 communes. Concrètement, le gouvernement apportera une aide financière de 2€ par repas aux communes qui n’appliquent pas de tarification sociale. Les communes disposant déjà de tarifications sociales ne seront pas concernées par cette aide. Au-delà du ciblage réduit du programme (une commune sur quatre), le coût de 1€ par repas est trop élevé pour les familles les plus en difficulté. De nombreuses communes font déjà mieux et proposent déjà des tarifications sociales inférieures à 1€ par repas pour les familles les plus démunies ! A Paris, les enfants de famille précaire déjeunent pour 0,13€, à Lille pour 0,5€…
Enfin, ces deux mesures financières ne coûteront presque rien à l’Etat, qui continue à déléguer les politiques sociales aux communes…tout en coupant leurs fonds.
Une mesure-passoire ? L’oubli des élèves du secondaire
Aujourd’hui, seuls les élèves des écoles maternelles et primaires sont concernés par les annonces. Pourtant, les inégalités d’accès à la cantine et les problématiques nutritionnelles ne s’arrêtent pas à l’entrée en 6ème !
En effet, c’est dans l’enseignement secondaire que l’on observe les inégalités les plus fortes d’accès à la cantine scolaire, car 55% des établissements de second degré qui n’appliquent pas de politique tarifaire spécifique pour les familles pauvres.
En 2017, la proportion d’élèves du second degré inscrits en cantine varie fortement d’un département à l’autre. Une partie de ces différences peut s’expliquer par des départements plus ou moins ruraux. Mais les inégalités sociales jouent aussi à plein régime : en Seine Saint-Denis, seulement 46,1% des élèves de second degré sont inscrits à la cantine contre 59,6% à Paris. La moyenne est de 69,9% pour la France métropolitaine.
Dans les départements d’Outre-Mer, seulement 40,5% des lycéens et collégiens sont inscrits à la cantine ! Pourtant, de nombreux élèves vivent loin de leur établissement : 18,5% en Guyane, 18,8% à Mayotte, 53,7% à la Réunion…
A l’échelle nationale, une enquête du Conseil National d’évaluation du système scolaire montre que si 59% des collégiens sont inscrits à la cantine, ce nombre s’écroule à seulement 29% des collégiens en établissement REP. Pire encore, 40% des élèves issus de familles pauvres ne mangent pas à la cantine (75% dans le public REP) contre 22% des élèves de famille favorisées et 17% des élèves issus de familles très favorisée. L’argent est déterminant dans l’accès à un déjeuner équilibré et régulier.
Il est grand temps que le gouvernement égalise l’accès à la cantine dans l’enseignement secondaire. La revalorisation des fonds sociaux collégiens et lycéen et du fonds social pour les cantines est un outil particulièrement adapté. Alors qu’ils recevaient 73 millions d’euros par an au début des années 2000, les fonds sociaux du secondaire ont chuté à 59 millions d’euros cette année. Un euro sur cinq a été retiré.Il est urgent de construire un modèle de restauration scolaire réellement accessible à tous et qui s’inscrive dans une transition écologie durable
L’alimentation scolaire n’est pas qu’une question d’égalité sociale, mais aussi de prévention sanitaire (en apportant les nutriments nécessaires à toute une génération) et de la transition écologique (en garantissant un débouché aux productions saines et soutenables). Pour atteindre ces objectifs, la France insoumise propose la gratuité des cantines scolaire et le développement d’un réel programme d’éducation à l’alimentation. De même, elle exige l’inscription dles cantines au cœur de la transition écologique, par l’utilisation de produits locaux issus de l’agriculture paysanne et biologique, en dérogeant si nécessaire aux règles de concurrence des marchés publiques imposées par l’Union Européenne.[