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Migrations de populations à l’heure du Coronavirus : l’invisible frontière gréco-turque

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Enfant migrant pour un accueil digne

Depuis le début de l’épidémie de Coronavirus, le sujet d’ordinaire si controversé des migrations de populations est complètement passé sous silence. Que faut-il en déduire ? Un gel des flux de populations ? La disparition des motifs de déplacement ?

En France, nous sommes étonné·es par le gouvernement Macron qui saupoudre d’humanité un quinquennat au service de la casse sociale. Plusieurs Centres de Rétention Administrative (CRA) ont été (presque) vidés pour n’y laisser que les sortants de prisons, généralement en attente d’expulsion. Le 24 mars dernier, c’est le camp d’Aubervilliers qui a été démantelé et plus de 700 personnes mises à l’abri dans huit gymnases des alentours. Comme quoi, tout est possible… Attention tout de même à ne pas oublier que le camp d’Aubervilliers n’était pas le seul, que la situation est toujours très tendue dans le Nord-Pas-de-Calais et que, pour l’heure, aucun CRA n’a été fermé, contrairement à la demande de plusieurs associations et collectifs.

Cependant, la France n’est pas l’épicentre de l’accueil des migrant·es. Il convient de faire un point sur la Grèce et l’Italie qui subissent l’approche Hotspot visant à mettre tous les moyens en œuvre pour assurer l’identification, l’enregistrement, la prise des empreintes digitales et le recueil des témoignages des migrant·es. Cela débouche généralement sur des mises en camp, des « encampements ». Les plus emblématiques et médiatisés de ces camps sont ceux de Lampedusa en Italie et Moria en Grèce où les conditions d’hygiène désastreuses dépassent l’entendement. Aucun des camps situés dans les Hotspots de ces deux pays n’a pour l’heure été vidé. En Italie, après le tournant xénophobe pris à la suite du décret Salvini, les Hotspots comptent bien moins de migrant·es qu’en Grèce. Dans ce pays en première ligne, ayant également fait le choix d’un gouvernement conservateur lors des derniers scrutins, outre la surpopulation qui règne dans les camps, les migrant·es doivent se confronter à des vagues de haines sans précédent de la part de la population locale. Plusieurs ONG internationales dont Médecins Sans Frontières ont demandé l’évacuation des camps, la requête est restée lettre morte.

Ceci nous amène à un deuxième degré de lecture : si tout le monde se lave les mains… la Commission européenne ! 

En raison du Coronavirus, les frontières extérieures de l’Union européenne seront fermées jusqu’à nouvel ordre, quelle aubaine ! Rappelons que depuis plusieurs semaines, la Turquie ne respecte plus son accord – dont la légalité a par ailleurs été plusieurs fois remise en question – avec l’Union européenne qui peine à dissimuler la violence inouïe avec laquelle elle refoule les migrant·es gagnant les îles grecques via la Turquie. Mais le Coronavirus est arrivé et l’opinion publique acquiesce, pour raisons de santé, la fermeture des frontières. En effet, où serait l’inéquité puisque nous-mêmes ne pouvons pas nous rendre à l’étranger ? Dès lors, si la Turquie n’assume plus le rôle de barrière que l’Union européenne lui a dévolu en échange d’avantages substantiels et que les frontières de ladite Union sont désormais fermées, que deviennent ces migrant·es ? Nous laissons votre imagination envisager les réponses les plus sordides et les drames qui se jouent dans cet interstice où l’on retrouve des êtres humains chassés par la Turquie d’une part et refoulés par l’Union européenne de l’autre.

Nous en appelons donc à une triple action de plaidoyer :

  • Exiger qu’en France tous les centres de rétention administrative soient vidés et que les populations des bidonvilles soient mises à l’abri ;
  • Exiger que les camps situés dans les Hotspots de Grèce et d’Italie soient vidés et que leurs populations soient mises à l’abri ;
  • Exiger de l’Union européenne l’ouverture de la Frontière gréco-turque pour mettre à l’abri les migrant·es quittant la Turquie.
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