Face à la catastrophe sanitaire et sociale que nous connaissons, il est urgent d’agir de façon coordonnée au plus près des populations. Ainsi, la planification de la mobilisation sanitaire doit aussi se faire à l’échelon municipal. C’est pourquoi le réseau des élu·es insoumis·es et citoyen·es a recensé les initiatives de ses élu·es et propositions de ses membres. Grâce à ce travail coopératif, nous publions aujourd’hui des préconisations municipales qui sont à mises à la disposition de toutes et tous. Vous pouvez les mettre en œuvre, les proposer ou vous en inspirer dans vos communes. Elles sont complémentaires avec les 11 mesures d’urgence proposées par La France insoumise.
La démocratie et l’implication citoyenne au service de la planification sanitaire
La démocratie et l’implication citoyenne ne doivent pas être mise entre parenthèses pendant la crise. Elles sont au contraire plus que jamais essentielles : pour prendre les bonnes décisions et protéger les populations, les pouvoirs publics doivent s’appuyer sur l’intelligence collective, permettre le débat et favoriser les initiatives d’entraide plutôt que l’égoïsme social.
1- Mettre en place un Conseil municipal sanitaire qui se réunit régulièrement par visioconférence. Animé par le/la maire, il réunit un·e représentant·e de chaque groupe politique siégeant au conseil municipal ainsi que des représentant·es des agents qui poursuivent des activités essentielles de service public. Élu·es, salarié·es et populations doivent pouvoir débattre et les pouvoirs publics s’appuyer sur cette intelligence collective. Les salarié·es des secteurs concernés doivent être associés à la mise en place des mesures de protection, notamment lorsque la ville ou l’intercommunalité est directement compétente ou donneuse d’ordre (bailleurs sociaux, ramassage des déchets…). La sécurité des agents doit en effet être la première priorité.
Ce Conseil est chargé de suivre l’évolution de la situation sanitaire, la bonne mise en place de mesures de protection des agents et des populations, veiller à la protection des plus vulnérables, aux besoins primaires des habitant·es et anticiper la sortie du confinement. Il s’appuie sur un ou plusieurs centres d’appels ainsi que les lieux d’implication citoyenne pour être à l’écoute des besoins et propositions (logements insalubres, impossibilité de faire ses courses, isolement…).
Il travaille notamment en collaboration avec les acteurs sociaux (CCAS, associations), de santé (médecins, pompiers, EHPAD, pharmacies, etc) et les services de l’État, notamment police et gendarmerie, présents sur la commune. Il élabore le cas échéant des initiatives municipales et les arrêtés nécessaires.
2- Un centre d’entraide téléphonique ouvert 24h/24h pour permettre l’écoute et l’assistance des personnes qui en ont besoin. Ce centre d’appel travaille en collaboration avec différentes équipes, professionnels, associations et institutions pour être en situation de mettre en œuvre des solutions, parfois dans l’urgence (nécessités alimentaires, personnes à la rue, soutien psychologique, mise à l’abri…). Ce centre permet aussi de recenser les volontaires bénévoles qui proposent leur aide aux plus fragiles (apporter des courses…).
3- Permettre aux lieux d’implication citoyenne (conseils de quartier, conseils citoyens, des associations, des jeunes, des aîné·es…) de se réunir de façon virtuelle pour faire appel à l’intelligence collective et permettre l’implication du plus grand nombre, faire remonter les situations problématiques, suggérer ou organiser des initiatives d’entraide.
4- Mettre en place une cellule dédiée exclusivement à l’aide aux personnels soignants mobilisés avec une information claire et précise : où faire garder les enfants ? Où se loger ? Comment se déplacer ? …
Limiter la propagation du virus et faciliter l’action des services publics, notamment soignants
Les autorités locales doivent prendre toutes les mesures qui s’imposent pour protéger les populations, limiter la propagation du virus et permettre de soulager l’action de celles et ceux qui sont en première ligne, dont les personnels soignants et les agents des services publics essentiels. Elles doivent pouvoir user de leur pouvoir de police face aux carences des décisions gouvernementales.
5- Prendre un arrêté exigeant l’interruption de tous les travaux non urgents sur le territoire communal et la fermeture des entreprises hors secteurs essentiels.
6- S’assurer de l’équipement et des achats nécessaires pour fournir des « Équipements de Protection Individuelle » à tous les agents municipaux, bénévoles, les travailleurs sociaux, médicaux et paramédicaux. Mettre en place une cellule spécifique dédiée à aider concrètement les personnels soignants mobilisés (garde d’enfants, logement, déplacement, soutien…).
7- Mettre à disposition des équipements d’hébergement et de chambres, y compris par la réquisition, dédiés au logement des personnes infectées par le virus pour leur permettre un véritable isolement par rapport à leurs familles.
8- Utiliser des équipements de type dortoirs scolaires pour proposer un lieu de repos distinct du foyer familial pour les soignant·es ou tout·e autre salarié·e contraint·e de travailler au contact de malades potentiels.
9- Organiser des services de transport, notamment à la demande, exclusivement dédiés aux agents des services publics mobilisés et à tous les travailleur·ses du soin n’ayant pas de véhicule personnel.
10- Assurer des conditions de sécurité sanitaire optimale dans les crèches et écoles accueillant des enfants des personnels soignants : approvisionnement régulier en masques, gants, gel hydroalcoolique.
11- Ouvrir ou rouvrir des points d’accès gratuits à l’eau (fontaines, bains douches) partout où c’est possible avec matériel d’hygiène et notamment savon. Assurer le branchement à l’eau potable des campements, villages précaires et bidonvilles.
12- Envisager et anticiper la mise à disposition d’établissements tels que des gymnases pour y aménager des centres de consultation pour les médecins libéraux et pour tou·tes les habitant·es qui n’ont pas accès à un médecin traitant afin que les consultations se fassent dans des conditions sanitaires encadrées.
13 - Engager avec l’ensemble des services concernés un suivi et recensement quotidien de la pandémie et de ses évolutions dans les hôpitaux, EHPAD et à domicile afin d’avoir au niveau communal, départemental et régional la possibilité d’anticiper les moyens à mobiliser.
Protéger les plus vulnérables
Le confinement n’est pas une situation naturelle pour l’être humain : s’il peut être nécessaire temporairement pour limiter la propagation du virus, il peut produire des situations de détresse. La crise sanitaire aggrave et révèle les inégalités : elle touche plus durement les plus vulnérables. L’entraide doit être, pour le service public local, un étendard.
14- Assurer une assistance psychologique par téléphone pour toutes les personnes qui supportent le moins le confinement, en s’appuyant sur des psychologues qualifié·es.
15- Recenser toutes les personnes de plus de 70 ans et/ou en situation de handicap, y compris en utilisant les fichiers du Plan canicule et établir avec ces personnes un contact téléphonique quotidien avec le CCAS.
16 – Permettre le confinement des personnes sans domicile fixe avec mise à disposition de lieux publics adaptés et de personnel d’accompagnement qualifié pour veiller au respect de mesures de sécurité sanitaire. Si les places d’hébergement manquent, réquisitionner les hôtels touristiques, logements vides, logements Airbnb si nécessaire et éviter si possible le confinement dans les gymnases.
Envisager le relogement des familles en situation de sur occupation, de mal logement indigne ou insalubre.
17- Organiser la distribution de « chariots-quarantaine » avec les produits de première nécessité pour toute personne qui en formule le besoin : sucre, pâtes, riz, huile, savon, légumes disponibles et produits locaux…
18- S’assurer de la prise en charge immédiate des femmes victimes de violence, de l’attribution et la prise en charge d’un logement d’urgence pour les accueillir si nécessaire avec leurs enfants.
19- Veiller à l’arrêt effectif des factures et paiements pour les services suspendus (crèches, cantines, extra-scolaire…) et versements d’aides financières par les CCAS pour les familles les plus précaires.
20- Appliquer une suspension des loyers pour les locataires d’un HLM en situation de grande précarité.
21- Prendre un arrêté portant moratoire sur toutes les coupures d’eau et électricité pour impayés.
22- Mettre en place un suivi particulier pour les enfants placés, avec notamment un dispositif d’accueil pour les enfant qui seraient infectés. Garantir l’accès à des contrats jeunes majeurs et n’engager aucune rupture de prise en charge des jeunes isolés.
Veiller aux besoins essentiels de la population
Dans cette situation de crise sanitaire qui révèle et aggrave les inégalités, le service public communal doit être, dans cette situation de crise sanitaire qui révèle et aggrave les inégalités et touche particulièrement les plus vulnérables, de permettre à toutes et à tous de subvenir à leurs besoins essentiels.
23- Mettre en place des marchés virtuels et de plein air sous des formes adaptées aux conditions sanitaires, en lien avec les producteurs locaux : prises de commande à distance, livraisons, pieds d’immeuble ou itinérance, marquage des distances, fourniture de masques, gants et gel hydroalcoolique aux vendeur.ses et client.es, limitation des emballages…
24- Mettre à disposition des familles en situation de précarité numérique des outils (tablettes, ordinateurs reconditionnés, connexion internet…) gratuitement pour permettre à toutes et tous d’accéder aux ressources éducatives et culturelles.
25- Mettre à disposition des ressources culturelles en ligne : mise en ligne de captations vidéos de spectacles, libre accès aux ressources dont disposent les médiathèques, bibliothèques numériques…
26- Solliciter et soutenir les propositions et démarches d’artistiques locales pour rompre l’isolement, en s’appuyant sur le réseau local des intermittent·es, compagnies, associations culturelles, également durement touchées par la crise sanitaire : lectures par téléphone ou sur internet, projections en plein air visibles depuis les fenêtres, concours de photos ou dessins en ligne…
Anticiper la sortie du confinement
Le confinement ne peut être qu’une situation temporaire, qui ne saurait être prolongée dans la durée. Le rôle des pouvoirs publics est d’anticiper dès à présent l’ensemble des mesures à prendre dès que le confinement sera levé et limiter ainsi le risque d’une nouvelle vague épidémique : dépistages massifs, mesures de protection… Le service public communal doit et peut également contribuer à cet objectif.
27- Mettre en place dès maintenant un plan de désinfection des écoles, équipements publics et de l’espace urbain (mobiliers urbains, abri-bus, parcs de jeux, squares…), afin de contribuer à lutter contre une nouvelle propagation du virus.
28- Anticiper la mise à disposition de lieux nombreux de dépistage et leur aménagement, en lien avec les hôpitaux et autorités sanitaires, pour permettre de réaliser les tests massifs qui seront nécessaires dans des conditions sécurisées, en évitant une nouvelle saturation des structures de santé.
29- Mettre en place des points de distribution publique de masques, gel… pour faire face, cette fois, à l’afflux de demande et permettre à chacun·e le respect des gestes barrières.
30- En vue d’aider les élèves qui auront pris du retard, éviter leur découragement et un éventuel décrochage post-confinement, refuser toute fermeture de classe à la rentrée prochaine et obtenir des moyens renforcés.
31 - Préparer un plan de soutien à l’économie locale notamment pour le commerce de proximité, favoriser la relocalisation d’activités et généraliser les circuits courts.
32- Stopper les projets destructeurs de biodiversité, instaurer une règle verte pour ne plus prélever à la nature plus que ce qu’elle peut reconstituer et soutenir la mutation écologique des systèmes agro-alimentaires.