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La règle verte ou la mort - par Charlotte Girard

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Edito de Charlotte Girard publié initialement dans l’Heure du Peuple le 17 septembre 2018 (voir ici)

Pour le Président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, qui faisait son dernier discours sur l’état de l’Union le 12 septembre dernier, « l’heure de la souveraineté européenne a sonné ». Pire qu’un glas pour les peuples. Pas un ingrédient du dogme libéral ne manque à l’appel : libre échange, réformes structurelles, lutte contre le terrorisme à tout-va et militarisation. La souveraineté européenne est le nom de l’intensification des politiques qui ont mis la Grèce à terre, neutralisent les liens sociaux, absorbent les ressources des pays du Sud et font flamber la planète. À aucun moment le rapport n’est fait entre ces modes de production et de consommation imposés à tous et la catastrophe écologique qui s’avance mettant de plus en plus de gens sur les routes de la survie. C’est au contraire un redoublement d’ambition pour les accords de partenariat économique avec les pays d’Afrique, la zone de libre échange pour compenser le Brexit, les traités bilatéraux pour le commerce et l’investissement comme le JEFTA avec le Japon.

Aux sommets des États membres de l’UE on prend le relais avec plus d’ardeur encore. En France, la détermination à poursuivre des réformes destructrices de notre système solidaire est entière en dépit de la mauvaise image du chef de l’État qui, comme chacun sait, n’est précisément qu’une image, fluctuant au gré des besoins d’audience et de puissants intérêts. Ni le plan Pauvreté, ni le plan Hôpital, n’en dévieront le cours tout attachés qu’ils sont à ne surtout pas défaire les équilibres injustes du capitalisme financier. Il faut des pauvres, y compris au travail, pour augmenter les taux de profits. Il faut de la prédation pour absorber les ressources disponibles, notamment publiques car elles sont gigantesques. Ce faisant, on paupérise davantage. Et le cercle est complètement vicieux.

Mais à massifier et appauvrir autant ce prolétariat, c’est la source du profit que l’on tarit. L’analogie avec l’abus de l’écosystème est parfaite. À trop épuiser la planète, c’est aux conditions de survie de l’espèce humaine qu’on attente. Ce sont les deux faces d’un même drame, causé par une même humaine cupidité.

C’est pourquoi la règle verte est le fil à plomb de tout avenir : qu’aucune politique publique, aucune décision d’État, ne conduise à prendre à la Terre plus que ce qu’elle peut renouveler. La règle verte est donc non seulement écologique, mais aussi sociale, économique et politique. Comment pourrait-il en être autrement dès lors que l’ambition ne peut viser moins qu’un changement de paradigme ?

Reste à créer les occasions d’en convaincre le grand nombre qui ne doivent pas s’arrêter aux seules échéances électorales. Elles sont stratégiquement indispensables. Mais une lutte pour l’hégémonie culturelle déborde nécessairement ces canaux étroits que ménagent encore nos institutions. Elle mobilise tout un chacun, là où il se trouve.

 

Charlotte Girard

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