Prime de Noël toujours gelée : le Père Noël est une ordure ?

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En 1998, à l’issue d’un mouvement social d’occupations d’antennes Assedic et d’agences ANPE durant tout l’hiver, le gouvernement Jospin ouvre aux bénéficiaires de certaines allocations le droit à un complément exceptionnel : une « prime de Noël », alors de 1000 francs. A l’heure actuelle, elle concerne 2,5 millions de personnes, qui reçoivent différentes aides sociales : revenu de solidarité active (RSA), allocation spécifique de solidarité (ASS), prime transition de solidarité, allocation équivalent retraite et prime forfaitaire de reprise d’activité. Elle constitue donc un coup de pouce, d’un faible montant, au moment où de nombreux ménages peinent à faire des cadeaux aux enfants et à assurer le minimum vital (énergétique et alimentaire) par grand froid. Elle est versée chaque décembre depuis 1998.

Or, depuis 19 années qu’elle existe, cette prime ne fait toujours pas partie du droit commun. Elle demeure « exceptionnelle » : son budget ne figure pas dans la loi des finances, et seul un décret au mois de novembre permet son versement. Cela signifie que le ministre en charge a tout pouvoir, s’il lui en prenait la fantaisie, de le supprimer sans consulter le parlement ! Les élus du peuple sont tenus à l’écart de cette « prime »… et ne peuvent pas la défendre, ou l’augmenter. Ainsi, c’est un acquis bien fragile.

De plus, la « prime de Noël » connaît une dégringolade depuis sa création. Vu qu’il s’agit d’un versement forfaitaire (d’un montant fixe), toute hausse des prix conduit à une diminution de son montant réel. C’est-à-dire que l’inflation rogne le pouvoir d’achat des bénéficiaires : lorsque les prix montent, une somme d’argent perd de sa valeur. Et depuis 2002 (fixation du montant actuel en euros), la prime de Noël n’a jamais été revalorisée suivant la hausse des prix, comme le sont d’habitude les prestations sociales. Ainsi, depuis 15 ans, l’inflation a continuellement grignoté le pouvoir d’achat des bénéficiaires de la prime de Noël. Ce n’est pas rien : -25 % sur la période ! Entre 2002 et 2017, la prime de Noël a perdu un quart de sa valeur. Sans rien dire, en refusant de la revaloriser, les gouvernements successifs tentent de faire disparaître cet acquis social, qui permet aux gens en grande précarité d’offrir à leur proche un peu de bonheur au moment des fêtes de fin d’année. Voici quel est le montant actuel de la prime de Noël, et son montant réel si la hausse des prix avait été répercutée depuis 2002 :

  • Pour une personne seule : aujourd’hui 152€, soit 190€ si elle avait suivi la hausse des prix. 37 euros de moins à Noël !
  • Pour un couple sans enfant ou personne seule avec un enfant : aujourd’hui 229€, soit 285€ si elle avait suivi la hausse des prix. 56 euros de moins à Noël !
  • Pour un couple avec un enfant ou personne seule avec deux enfants : aujourd’hui 274€, soit 342€ si elle avait suivi la hausse des prix. 68 euros de moins à Noël !
  • Pour un couple avec deux enfants : aujourd’hui 320€, soit 399€ si elle avait suivi la hausse des prix. 79 euros de moins à Noël !
  • Pour une personne seule avec trois enfants : aujourd’hui 335€, soit 418€ si elle avait suivi la hausse des prix. 83 euros de moins à Noël !
  • Pour un couple avec trois enfants : aujourd’hui 381€, soit 475€ si elle avait suivi la hausse des prix. 94 euros de moins à Noël !
  • Pour une personne seule avec quatre enfants : aujourd’hui 396€, soit 494€ si elle avait suivi la hausse des prix. 98 euros de moins à Noël !
  • Pour un couple avec quatre enfants : aujourd’hui 442€, soit 551€ si elle avait suivi la hausse des prix. 109 euros de moins à Noël !

La députée insoumise Mathilde Panot s’est insurgée contre la prolongation du gel par un gouvernement qui, en même temps, multiplie les cadeaux fiscaux aux plus riches. Il n’hésite plus à prendre 2 euros (!) aux plus pauvres, pour verser quelques milliards aux plus riches. Ainsi, la suppression de l’impôt sur la fortune va coûter 5 milliards aux contribuables au profit des grands patrimoines ; pour la même somme, on aurait pu multiplier par quinze la prime de Noël, soit 2000€ par allocataire ! Alors que les fêtes battent leur plein, le gouvernement réserve son visage de Père Noël aux plus riches, et arbore celui du Père Fouettard à destination des plus précaires.

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