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Motion de censure déposée en application de l’article 49 alinéa 3 de la Constitution - 30 novembre 2022

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Le gouvernement achève de passer en force le PLFSS en lecture définitive au moyen d’un septième 49-3 en l’espace de six semaines. Au total, il aura enclenché le 49-3 à cinq reprises sur le Projet de loi de Financement de la Sécurité Sociale : les 20 et 26 octobre 2022, les 21 et 26 novembre 2022… et ce jour. Nous n’acceptons pas ces méthodes autoritaires.

Le piétinement du Parlement est d’autant plus intolérable que la crise du système hospitalier est à son comble. Pire, le gouvernement y a lui-même contribué par sa politique austéritaire et son obsession à vouloir transformer l’hôpital en entreprise. Les économies exigées de l’hôpital se font et se feront encore davantage au détriment des patients et des soignants.

Le bilan du gouvernement, c’est celui de l’hémorragie à tous les étages. Des dizaines de milliers de soignants manquent à l’appel. Nombre de ceux qui restent envisagent de rendre leur blouse dans les mois qui viennent. Cette détresse a été renforcée par la réduction des capacités d’accueil et force également la fermeture de lits faute de personnel : 21 000 lits d’hospitalisation complète ont été fermés sous le précédent quinquennat, dont 4300 l’an dernier.

Pas un secteur n’y échappe. L’austérité reste de mise pour les EHPAD : seulement 3000 recrutements sont prévus en 2023 (soit un demi poste par entité), contre 50 000 annoncés sur le quinquennat et au lieu des 240 000 nécessaires. La psychiatrie tire elle aussi la sonnette d’alarme. Le nombre de lits d’hospitalisation complète en psychiatrie a été divisé par deux en 30 ans et 30% de postes de psychiatres sont vacants à l’hôpital. Le plan annoncé il y a plus d’un an par le gouvernement (création de 800 postes dans les Centres Médico-Psychologiques) reste insuffisant.

Par cette récidive de 49-3, le gouvernement a refusé aux parlementaires le temps d’un réel débat. Les circonstances le réclament pourtant. En effet, la superposition des manques humains et matériels est désastreuse : cet été, 80 services d’urgence ont dû fermer la nuit et une quarantaine le jour. Les logiques de marché provoquent chaos et pénuries. Ainsi, le CHU de Nantes est en grève depuis plus d’un mois. Des médecins sont acheminés par avion dans les déserts médicaux. Le tri des enfants en pédiatrie se poursuit. Comme l’amoxicilline, au moins 277 médicaments font actuellement l’objet de difficultés d’approvisionnement. Les signalements de risques de ruptures ou les ruptures de stock avérées ont été multipliés par 5 en cinq ans.

 En définitive, rien dans ce projet de loi n’est prévu pour répondre à l’urgence. Il ne contient rien pour acheter le matériel manquant, rien pour revaloriser les salaires au moins à hauteur de l’inflation, rien pour recruter les personnels nécessaires et leur assurer des conditions de travail convenables.

Par cette série de 49-3, le gouvernement impose sans débat et en dépit d’une opposition exprimée de tous les bancs, le déremboursement des arrêts de travail délivrés par télé-consultation par un médecin autre que le médecin traitant ou par un médecin rarement consulté. Ce, alors même que 11 % des Français n’ont pas de médecin traitant (rapport Sénat, mars 2022) et que 6 000 médecins généralistes manquent dans les bassins de vie ruraux (étude AMF, septembre 2022).

Par cette série de 49-3, le gouvernement impose des économies drastiques qui vont accabler encore davantage des hôpitaux en grande difficulté. En effet, la prétendue hausse de 3,9% du budget des hôpitaux ne permet pas de compenser les 4,3% d’inflation. Il impose également une baisse de 1,2 % de l’ONDAM en prenant en compte les dépenses liées à la pandémie de Covid-19 ; et une hausse de 3,2 % sans, c’est-à-dire inférieure à l’inflation. Il impose aussi une trajectoire d’austérité drastique pour les prochaines années, avec une augmentation de l’ONDAM de seulement 2,3 % en 2024.

Par cette série de 49-3, le gouvernement est passé outre sur le vote des parlementaires en commission. L’allègement de la fiscalité sur les véhicules mis à la disposition permanente des intervenants à domicile par leur employeur ? Non retenu. La conditionnalité des exonérations de cotisations sociales au respect de l’égalité femmes-hommes ? Non retenu. L’annulation du transfert du recouvrement des cotisations de l’AGIRC-ARRCO vers l’URSSAF ? Non retenu.

Par cette série de 49-3, le gouvernement va accabler davantage la Sécurité sociale : elle supportera davantage les coûts des médicaments que cela n’était prévu dans la première mouture du texte pour le plus grand bénéfice du lobby pharmaceutique, et subira des milliards de manque à gagner du fait d’une compensation insuffisante à la Sécurité sociale d’exonérations de cotisations en tous genres.

Par cette série de 49-3, le gouvernement contourne toute remise en question de la Caisse d’Amortissement de la Dette Sociale (CADES) dont les 18 milliards d’euros en 2023 rembourseront la dette liée à la pandémie de Covid-19 plutôt que de financer un plan d’urgence pour l’hôpital et les EHPAD. 

En définitive, le Gouvernement n’a retenu aucune leçon du Covid-19. Cet énième recours au 49 alinéa 3 met sous le boisseau nos propositions au service de l’amélioration concrète de la vie du peuple français. Nous réaffirmons au contraire l’urgence de reconstruire l’hôpital public. Cela suppose de planifier le recrutement massif de personnels, de sortir de la tarification à l’activité, d’instaurer le remboursement à 100% des soins de santé prescrits, d’éradiquer les déserts médicaux et de constituer un pôle public du médicament pour garantir notre souveraineté sanitaire.

Avec cette motion de censure, nous dénonçons également les mensonges iniques de la minorité présidentielle, relayés jusqu’au plus haut de niveau de l’État, visant à faire croire à une alliance programmatique entre les oppositions. Il n’y aura jamais ni complaisance, ni connivence avec l’extrême-droite.

Au contraire, nous défendons un autre projet de loi de financement de la sécurité sociale, basé sur l’égalité et l’accès aux soins de toutes et tous, aux antipodes des principes d’inégalités et de préférence nationale portés par l’extrême-droite de l’hémicycle. Notre vision se veut l’héritière du Conseil National de la Résistance qui préparait la France d’après-guerre pendant que l’extrême-droite, elle, collaborait à Vichy.

La brutalité gouvernementale est dirigée contre le Parlement, contre le personnel soignant et contre le peuple français tout entier. Conformément à l’article 49 alinéa 3 de la Constitution et aux articles 153 et suivants du règlement de l’Assemblée nationale, nous, députées et députés, déposons la présente motion de censure.

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