PLF 2020 : Fini le « sport pour tous », place au « sport pour certains »

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Intervention de Michel LARIVE en commission des affaires culturelles sur la mission « Sport, Jeunesse et Vie associative » du projet de loi de finances pour 2020.

« L’année dernière lors de l’étude du Projet de loi de Finances 2019, je déplorais déjà le fait que le financement des Jeux Olympiques et Paralympiques pour Paris 2024 se fasse au détriment des clubs sportifs amateurs. A mon grand regret je constate que vous persistez cette année encore dans cette voie.

La hausse globale de 9,8% annoncée pour le ministère des sports intervient après deux années de baisse successive, et elle masque en réalité un fléchage des crédits complètement déséquilibré. La plus grosse partie de cette hausse va au programme « Jeux Olympiques et Paralympiques 2024 », destiné au financement des infrastructures, qui voit son budget presque doubler avec une augmentation de 63 millions d’euros. Mais parallèlement l’enveloppe destinée à l’Agence Nationale du Sport (ANS), que vous avez créée avec pour ambition affichée de soutenir les fédérations et les infrastructures sportives dans les territoires, diminue de 7 millions d’euros.

De nombreux acteurs du sport s’inquiètent du déploiement trop lent des moyens de cette nouvelle agence dans les territoires, et déplorent déjà son caractère éminemment technocratique. Comment voulez-vous que les fédérations s’autonomisent si vous ne leur en donnez pas véritablement les moyens ? 

La pratique sportive repose sur les millions de citoyens et de citoyennes qui donnent de leur temps, gratuitement, pour faire vivre les clubs. Par vos choix budgétaires, vous faites peser de plus en plus sur leurs épaules la responsabilité d’organiser la vie sportive de la nation.

Avec l’ANS, vous actez une forme de rupture dans la continué du service public du sport, qui annonce sans nul doute le déclin du Ministère des Sports. Vous souhaitez visiblement mettre fin au rôle prépondérant des pouvoirs publics dans l’organisation et le financement du sport français, au profit de partenariats public-privé.

L’Etat ne peut pas simplement se désengager des territoires et attendre à qu’une « main invisible » organise miraculeusement le secteur sportif. Le développement des outils numériques et la multiplication des contrats précaires ne sauraient répondre aux besoins des associations sportives, qui manquent cruellement de moyens humains.

Comme à votre habitude vous privilégiez une vision purement comptable et spéculative du sport. Fini le « sport pour tous », vecteur de cohésion sociale, place au « sport pour certains », en l’occurrence ceux qui peuvent se le payer !

Les moyens accordés pour les JO 2024 et l’amélioration des performances sportives doivent être proportionnés à ceux alloués à la pratique quotidienne et populaire du sport, car l’un ne va pas sans l’autre. En négligeant le sport amateur, vous creusez un fossé artificiel entre l’élite sportive et l’ensemble des pratiquantes et pratiquants, qui constitue pourtant sa base et son vivier. Renforcer les moyens accordés aux clubs amateurs et développer les infrastructures dans les territoires est indispensable pour susciter des vocations chez nos futurs champions.

Par ailleurs, face au climat délétère qui s’installe dans notre pays, opposant telle catégorie de population à une autre, nous savons que le sport peut être un puissant vecteur pour transmettre les valeurs de fraternité, de tolérance, de coopération et d’entraide, qui font malheureusement cruellement défaut aux colporteurs de la haine et du rejet de l’autre qui salissent notre République. La pratique du sport a largement démontré son efficacité en tant qu’instrument d’inclusion sociale, de santé publique et d’épanouissement personnel.

Dans ce contexte, la responsabilité de votre gouvernement est grande. Allez-vous négliger cet outil indispensable pour tisser du lien social et favoriser le vivre ensemble, ou bien vous engager véritablement pour construire une politique sportive ambitieuse au bénéfice de toutes les citoyennes et de tous les citoyens, quelles que soient leur condition sociale et leurs origines culturelles ?

En attendant votre réponse, et avec les éléments que vous proposez aujourd’hui, nous vous informons que le groupe de la France insoumise ne votera pas les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ». »

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