Question écrite | L’avenir de l’Office national des forêts (ONF)

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Michel Larive a attiré l’attention de Mme la ministre de la transition écologique et solidaire sur l’avenir de l’Office national des forêts (ONF).

« De vives inquiétudes concernant la pérennité financière de l’établissement public, de son fonctionnement et de ses missions actuelles conduit ses agents à se mobiliser depuis plusieurs mois pour la sauvegarde du service public forestier. L’ONF s’est vu confier depuis sa création en 1964 d’importantes missions de service public. Il assume la gestion et la protection des forêts du domaine public (environ 10 % du territoire national), contribue à l’aménagement de certains territoires de montagne et du littoral, et assure des missions d’accueil du public. Près de 40 % de l’approvisionnement de la filière bois provient des forêts publiques. Par ailleurs, l’ONF contribue très largement à la protection de l’environnement et à la sensibilisation de la population aux enjeux actuels.

Malheureusement, l’office connaît des difficultés financières importantes depuis de nombreuses années. Ses effectifs ont déjà été réduits de 40 % en 30 ans. La situation s’étant aggravée au cours de l’année 2018, le Gouvernement a décidé de créer une mission interministérielle pour évaluer rigoureusement la situation et proposer des solutions. Mais les préconisations du rapport sur l’évaluation du contrat d’objectifs et performance (COP) 2016-2020 de l’Office national des forêts (ONF), publié le 15 juillet 2019, semblent confirmer certaines des inquiétudes formulées par les agents concernés, et ravive les tensions. Parmi les éléments qui cristallisent les craintes se trouve la proposition de retirer le caractère dérogatoire du statut de l’ONF, ce qui en ferait un EPIC de droit commun et ne permettrait plus l’emploi de fonctionnaires. Une fois de plus, le Gouvernement semble décidé à faire des fonctionnaires la variable d’ajustement des budgets, comme s’il était possible de faire mieux, plus vite et moins cher avec toujours moins de ressources humaines. Dans l’hypothèse d’un tel changement de statut, les effectifs des fonctionnaires de l’ONF seraient progressivement réduits, et ceux restant en poste seraient placés en détachement. Par ailleurs, pour permettre aux salariés privés embauchés par l’office d’assurer les missions des gardes forestiers et donc d’agir avec des pouvoirs de police administrative et judiciaire, le rapport préconise de modifier le code forestier. Ce serait donner des prérogatives régaliennes à des agents privés, ce qui remettrait en cause le socle des fondements républicains du pays. La réduction du nombre de membres du conseil d’administration de l’ONF de 30 à 12 personnes fait aussi partie des préoccupations sérieuses.

Sous prétexte de préserver l’office de l’influence des personnes en situation de conflit d’intérêt, seraient ainsi exclus du conseil d’administration la Fédération nationale des communes forestières (FNCOFOR) qui regroupe les 11 000 communes forestières de France, propriétaires des deux tiers des forêts publiques, l’Association des régions de France (ARF), qui pourtant se trouve de plus en plus impliquées dans la politique forestière au travers des Contrats régionaux forêt bois (CRFB), la Fédération nationale du bois (FNB), qui représente la filière dédiée et ses 400 000 emplois, l’association France nature environnement (FNE) qui représente les associations de protection de l’environnement au sein de l’instance, la Fédération des chasseurs, dont la connaissance du terrain et le point de vue semble pourtant avoir toute sa place au conseil, et les représentants des ministères en charge des politiques publiques concernées, qui sont les seuls à pouvoir sérieusement modifier les textes législatifs régissant l’ONF et fixant la politique nationale de gestion des forêts. Ce nouveau conseil d’administration de l’ONF serait composé de 7 membres désignés directement par l’État, 3 représentants du monde de l’entreprise et seulement 2 représentants du personnel de l’ONF. Cette proposition est très mal reçue par les fonctionnaires de l’office qui la considèrent comme portant préjudice à l’objet même de l’office.

Le désengagement de l’État vis-à-vis des missions de service public assurées par l’ONF se manifesterait également par le renoncement à fixer « les orientations de gestion et les programmes d’actions de l’établissement public ainsi que les moyens de leur mise en œuvre » dans le contrat pluriannuel établi avec l’office. Il lui semble que ces questions relèvent justement des politiques publiques bâties sur une vision précise de ce que doivent être les espaces forestiers en France, comment ils sont entretenus, dans quelles mesures et à quelles conditions on peut puiser la ressource bois. Il semble que ce soit aussi à la puissance publique de se doter des moyens financiers, techniques et humains pour permettre la mise en œuvre de ces politiques.

Enfin, la proposition de supprimer du code forestier « la mention d’une contribution spécifique des forêts des collectivités à l’intérêt général » est scandaleuse, car cela remet en cause la réalité de cette contribution, qui justifie actuellement l’application du régime forestier dans les forêts des collectivités. Les fonctionnaires de l’ONF, attachés à leurs missions de service public, mais aussi les élus des collectivités concernés, membres de la FNCOFOR, s’inquiètent de ce que pourrait impliquer cette suppression, à savoir la disparition progressive du régime forestier. Pour le FNCOFOR en particulier, « sa non-application fragilise le système ». Les élus soutiennent qu’il ne s’agit pas de redéfinir le périmètre du régime forestier, mais bien plutôt d’en préciser les contours actuels, car selon eux il s’applique de manière très inégale selon les collectivités.

Si plusieurs acteurs concernés reconnaissent la qualité du diagnostic fourni dans le rapport de la mission inter-ministérielle, les préconisations susmentionnées leur semblent vraiment inadaptées et font planer l’ombre d’une privatisation à court termes de la gestion des forêts publiques. Dès lors, la possibilité que ces modifications du code forestier puissent être effectuées par ordonnances, comme le laissent supposer certaines sources, suscite de vives craintes.

Il lui demande ce qu’elle pense des propositions du rapport interministériel concernant les points évoqués ci-dessus, et si elle peut s’engager fermement à tout faire pour permettre à la représentation nationale de débattre de ces questions au Parlement. »

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