Quand la poussière retombe

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Depuis sept mois, ainsi allait la vie politique, entre le culte médiatique d’un macronisme omnipotent et l’espoir de commentateurs paresseux de voir resurgir du passé les forces du confort.

Les élections partielles de ce dimanche ont refermé cette parenthèse. Elles donnent à voir non plus simplement l’émergence, mais l’implantation durable d’un paysage nouveau : la guerre des droites LR-EM est engagée tandis que la France insoumise s’installe à la troisième place comme unique force populaire utile. Tout le reste est arasé. Le FN plonge sous les 10 %, partout dépassé par LFI. Quant au PS, il est confirmé qu’il n’est plus, ou si peu.

M. Macron et LREM occupent désormais un espace qu’il serait contre-productif de nier. Mais les pertes électorales à l’occasion de ces partielles, et plus encore leur incapacité à mobiliser un électorat sur les politiques qu’ils mettent en oeuvre, en redéfinissent le socle.  Plus vite que tout autre avant lui M. Macron a porté la grève civique (71 % d’abstention) à des niveaux qui ne sont généralement atteints qu’en fin de mandat. Il a ainsi déjà échoué sur l’engagement majeur qui l’a fait élire : redynamiser la démocratie. Le défaut d’adhésion des électeurs de M. Macron de 2017, qui devraient pourtant être les plus mobilisés pour défendre la politique du candidat pour qui ils ont voté, la chute du score des candidat.e.s LREM dans cet océan d’abstention, les défaites qu’elle annonce dès dimanche prochain, témoignent de ce que la parole présidentielle n’imprime déjà plus.

Alors certes LR tire mécaniquement bénéfice électoral des vases communicants et du retour au bercail de la droite libérale. Mais c’est un parti déchiré, qui, dès son premier conseil national, fait tour-à-tour huer son nouveau président et ses opposants internes. Il n’y a là aucun potentiel d’agrégation solide.

Pendant ce temps, la France insoumise, forte de sa troisième place, s’enracine dans des circonscriptions qui pourtant ne lui sont pas a priori favorables. La mise en oeuvre de pratiques militantes qui vont au contact des gens a ainsi permis des progressions spectaculaires dans le Val-d’Oise qui bouleversent l’ordre d’arrivée du tiercé de tête dans des villes entières. C’est partout la promesse de conquêtes à venir par la généralisation de l’implication dans l’action.

C’est donc un équilibre provisoire qui apparait. Provisoire car il est maintenant établi que les élections de 2017 n’ont pas suffi à purger la colère populaire. Il est ainsi singulier de constater qu’à côté de l’abstention record, ce sont les deux finalistes de la dernière présidentielle qui reculent le plus dans ces partielles, preuve que le dégagisme continue à faire son oeuvre et prend de nouvelles cibles. Mais si cet équilibre est provisoire, il indique aussi que l’ancien temps ne reviendra pas.

La poussière retombe. Ce n’était que deux partielles mais elles modifient le regard porté sur l’horizon. Elles modifient aussi immédiatement le rapport à la lutte et à la confrontation avec le roi des riches. Modification du rapport de force pour les personnels des Ehpad qui en appellent aujourd’hui à la dignité d’une société qui prendrait enfin soin de ses aînés, pour les lycéens, étudiants et enseignants qui jeudi afficheront leur refus d’un bac territorial et de la sélection à l’Université, pour les cheminots qui défileront mardi prochain, et pour tous les autres qui se dressent contre les politiques de M. Macron.

La poussière retombe et il faudra bien finir par passer un coup de balai.

François Cocq

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