Bibliothèques et lecture publique : un texte qui manque d’ambition.

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Retrouvez l’intervention de Michel LARIVE en commission des affaires culturelles sur la proposition de loi, adoptée par le Sénat, relative aux bibliothèques et au développement de la lecture publique.

« Il y a 10 jours, se clôturait la 8ème édition des Journées Nationales d’Action contre l’Illettrisme, organisée par l’Agence Nationale de Lutte contre l’Illettrisme (ANLCI). Ce fléau touche environ 2,5 millions de nos concitoyens qui rencontrent des difficultés importantes dans la recherche ou l’exercice d’un emploi, dans leurs démarches administratives ou leurs gestes quotidiens. Je tiens donc par commencer à saluer cette initiative parlementaire à propos des bibliothèques et du développement de la lecture. Ces deux sujets essentiels sont rarement mis à l’honneur et n’ont été que trop peu soutenus par les Gouvernements successifs. Je me réjouis donc que l’on puisse débattre aujourd’hui et la semaine prochaine en hémicycle, autour de la politique publique de développement des bibliothèques et de la lecture.

Les réformes de la majorité actuelle concernant ce secteur ont été réalisées au détriment des personnels. Ce fut le cas, notamment, lors de l’extension d’horaires d’ouvertures des bibliothèques le dimanche, mise en œuvre par le Gouvernement, suite au rapport Orsenna-Corbin. Les salariés ont observé dans plusieurs villes que cette extension des horaires d’ouverture, n’a entrainé aucun recrutement supplémentaire. Par endroits, d’autres plages d’accueil des usagers ont même été supprimées, y compris celles réservées aux scolaires. Pour prendre l’exemple de Paris, la baisse des effectifs a engendré une réduction des horaires d’ouverture en matinée ou pendant les vacances scolaires. Ceci est symptomatique de la méthode de ce Gouvernement, qui ne met jamais à disposition les moyens suffisants pour l’application de ces réformes. Certes, les crédits du Plan bibliothèques sont passés de 80,4 à 88,4 millions d’euros en 2018. Mais ces crédits ne sont pas pérennes puisque le financement ne peut pas excéder 5 ans. On peut donc se demander comment les collectivités vont-elles pouvoir maintenir les emplois créés une fois ces délais écoulés ? La seule solution mise sur la table par Monsieur Orsenna, c’est l’embauche de jeunes en services civiques ou de contrats précaires, comme si bibliothécaire n’était pas un métier à part entière, spécifique et réclamant des qualifications et des compétences précises.

Une bifurcation dans la politique publique en faveur des bibliothèques et du développement de la lecture est donc absolument nécessaire. Ce texte a le mérite d’inscrire quelques grands principes dans la loi : principe de gratuité d’accès aux bibliothèques des collectivités territoriales, pluralisme des collections, ou encore don des livres devenus inutiles.

Cela dit, il ne permet pas de répondre aux tensions actuelles dans ce secteur. Il ne préserve pas les droits des personnels face à l’extension des horaires d’ouverture, n’assure pas l’égalité d’accès aux bibliothèques sur tout le territoire national, ne développe pas les actions « hors les murs » en faveur de la lecture, n’améliore pas la participation des usagers dans le fonctionnement des bibliothèques, et ne protège pas le métier de bibliothécaire titulaire à l’heure où le nombre de contractuels augmente fortement. De plus, l’article 2 permettant d’inscrire le principe de liberté d’accès aux bibliothèques municipales et intercommunales, ne fait pas mention du pass sanitaire. Or, ce dernier y est obligatoire pour accéder aux bibliothèques, mais pas pour les librairies ou les centres commerciaux, ce qui crée une 1ère incohérence. La 2ème incohérence, c’est que les Bibliothèques Universitaires, la Bibliothèque Publique d’Information, la Bibliothèque Nationale de France et les bibliothèques spécialisées ne sont pas soumises à l’obligation du pass sanitaire. Je regrette que l’occasion de dénoncer cette entrave à la liberté d’accès aux bibliothèques et à la lecture n’ai pas été saisie.

En bref, ce texte me parait relativement consensuel, mais manque d’ambition pour une véritable politique publique en faveur des bibliothèques et du développement de la lecture. C’est la raison pour laquelle nous soutiendrons ce texte, mais profiterons de l’analyse des amendements pour être force de propositions. »

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